La beauté
des cheveux compte beaucoup içi.
Si la laideur, comme certaines odeurs, attire les influences maléfiques, la
beauté, tout comme l'embonpoint, est gage de bonheur !
A la mort,
les cheveux sont entourés de baies de Pua afin
qu'ils se conservent longtemps.
Leur longévité, tout comme celle de la barbe ou
des ongles, en fait les dépositaires d'une force de vie transmissible, d'où les
nombreux ornements auxquels ils sont associés.
et autrefois les morts étaient enterrés dans des cavernes et il
était coutume de les déterrer au bout de deux ou 3 ans pour récupérer
le crâne et les cheveux !!...
Ceci permet de souligner que les parures de fleurs ou de plumes portées au
cours des fêtes n'ont pas qu'une valeur
esthétique mais possèdent aussi un pouvoir.
Leur première vertu est de transmettre une propriété et de protéger ; d'où les
emplacements du corps où ils sont portés : tête et articulations.
Ainsi de petites touffes de cheveux étaient ajoutées aux parures ou aux instruments de musique.
De longues mèches ornaient aussi les pirogues de guerre, tandis que la proche
parenté d'un futur guerrier lui offrait ses cheveux au cours d'une
cérémonie afin qu'un tuhuna ( prêtre) les boucle de façon définitive et les
monte en parure : bracelets pour les poignets et les chevilles, capulet etc...
Le prestige
d'une barbe blanche était lui associé à la sagesse et au respect dû aux
anciens ... La barbe des vieillards était recherchée et au besoin celles
d'étrangers blonds à qui l'on achetait les indispensables brins destinés aux
parures de danse qui évoquent la clarté de l'astre féminin ...
....?
"Toutes les femmes sont jolies et quelques-unes d'une très grande beauté.
Ces Insulaires ne paraissaient pas regarder la continence comme une vertu, les
tahitiennes vendaient leurs faveurs à nos gens librement et en public, et même
leurs pères et leurs frères
nous les amenaient souvent eux-mêmes, afin de transiger sur un article ;
ils
connaissent pourtant le prix de la beauté, et la grandeur du clou qu`on nous
demandait pour la jouissance d'une femme, était toujours proportionnée à ses
charmes.
Les Insulaires, qui venaient nous présenter des filles au bord de la
rivière,nous montraient avec un morceau de bois la longueur et la grosseur du
clou pour lequel ils nous les céderaient."
écrivait Wallis
( un navigateur anglais du 18ème)
Il faut savoir que les polynésiens ne connaissaient pas le fer et trouvaient les clous
très pratiques pour pêcher !... à moins que le texte soit allusif au membre des
occidentaux... humour anglais oblige !
Les pirogues remplies
de nymphes nues, les invites sexuelles explicites à en user qui les
accompagnent et cette fameuse « liberté sexuelle » avant mariage, l’amour
pratiqué en public tout cela étonna fort les navigateurs européens,
mais sont en contradiction avec d'autres faits rapportés dans les journaux de bord.
Les très jeunes filles ainsi
présentées étaient apeurées ; elles n'étaient pas volontaires mais « offertes »
par les chefs de tribus qui voyaient en ces hommes blancs des envoyés du monde
divin.
De même pour les jeunes hommes : ingurgiter la boisson cérémonielle (le kava)
visait à la reproduction de l’identité masculine par analogie à l’absorption de
sperme , liqueur régénératrice de force, dispensatrice
de vie.
La boisson sacrée transfigurait les chefs en ancêtres divins et les
sujets masculins en hommes forts. On retrouve là les mythes d'Eleusis dont Titus
a parlé sur le bulletin et peut-être même le lointain archétype du cérémonial
eucharistique...
L'occident découvrait
ainsi que la vie pouvait être sans
contraintes sexuelles ...
et les textes idéalisés sont révélateurs des frustrations et projections
inconscientes d'une civilisation... plus qu'une description exacte d'un paradis qui n'a jamais existé ...
et qui donna naissance au
mythe du "bon sauvage"...
et puis
comme c'est un sujet qui nous intéresse mais qui hélas est devenu "tabouuuuu" un
des oncles nous donna ces informations...
En Septembre de l'année dernière au tribunal de Papeete on
jugeait l'affaire suivante : une fillette abusée par son grand-oncle faamu
( adoptif)
de 36 ans son aîné.
A 9 ans les premiers attouchements, à 11 ans les rapports sexuels, à 13 le premier bébé.... Trois enfants naîtront....
La fille n’a porté
plainte qu’une fois adulte, après avoir été poussée par des "autorités".
Certains faits
sont prescrits. Le violeur : « elle était comme ma femme, elle ne se refusait
pas ; c’est même elle qui me provoquait ! »
La mère de la fille : « je ne sais
rien, j’avais d’autres enfants à charge. »
La grand-mère : « j’ai honte de cette affaire. C’est ma petite-fille qui m’a
amenée ici, au tribunal. Pourquoi elle me fait ça ? Elle a couché avec mon
mari…et alors ? »
Autre affaire : à 14 ans violée par l’ami de sa mère, elle la prévient mais
celle-ci ne la croit pas. C’est sa grand-mère qui avertira les gendarmes. Le
beau-père est arrêté. Au tribunal, il dira qu’elle était consentante car elle ne
l’avait jamais repoussé....on condamnera... mais les familles elles ne le font
pas...tradition oblige ...
seule la doxa occidentale crée des tabous dans ce domaine... et on sait que
Gauguin s'en plaignait déjà...
Faut dire que la famille est large içi... et
les enfants n'appartiennent
à personne...
de plus ils sont magnifiques quand ils sont jeunes et très vite la beauté içi se
fane
et si quelqu'un n'en a pas ...et désire un héritier ou une
compagne...
"aita pe'a pe'a... y a pas de problème" ...il suffit qu'il ou elle consente
nous retrouvons là la liberté des peuples premiers... vis à vis de la libido ...vécue comme chose "naturelle"...comme celle des Wayanas ou des Kunas...
Georges De Caunes ( le père d'Antoine) qui connaissait bien la Polynésie et les Marquises ( voir plus loin) raconte dans un de ses livres l'histoire suivante:
"Les mères tahitiennes
aiment leurs enfants...mais sont prêtes aussi à les
abandonner ou plutôt à les donner.
La jeune mère tahitienne, je le maintiens, adore son bébé. Elle le renifle -
on n'embrasse pas les enfants à Tahiti. Elle le sent, le serre contre elle
avec fierté, avec joie. Mais si une amie moins heureuse le lui demande... elle
lui donnera son bébé... Vois-tu, donner son enfant à une amie pour lui faire
plaisir, ce n'est pas l'abandonner.
C'est un usage, une très vieille coutume d'il y a très longtemps... bien avant
l'arrivée de M. de Bougainville, et le bébé ainsi donné sera aussi heureux que
tous les autres enfants tahitiens. Ici, on aime les enfants, tous les enfants,
même ceux des autres...
Il y a très
longtemps, une famille tahitienne vivait heureuse dans sa modeste
case du village de Punavia. Un jour, la jeune femme vaquait aux travaux du
ménage, tandis que son jeune enfant jouait près d'elle, le petit Telii, un
bébé de deux ans. Soudain, la jeune femme s'inquiète, ne voit plus le bébé.
Elle sort de la case, le cherche dans les cases voisines, court vers le lagon
en hurlant
- Tehi ! ... Tehi ! ...
- Je suis là, maman, répond tranquillement Tehi, occupé à jouer dans le lagon.
- Tehi, viens ici, viens Tehi. Tu sais le requin est méchant. Le requin mange
les petits enfants... Tehi... menace la mère en entrant à son tour dans le
lagon pour aller chercher son fils.
A quelques mètres
d'elle, Tehi a cessé de rire, il pleure
- Je me suis écorché au corail, j'ai mal...
Alors la mère horrifiée aperçoit une petite tache de sang à la surface du
lagon... et tout près une nageoire noire fend le bleu de l'eau. En une
seconde, Tehi est happé par la forme noire et disparaît sous l'eau. A la
surface du lagon, la tache de sang s'étale.
Aux cris de la jeune femme, tous les habitants du village se sont précipités
vers la plage. Ils sont arrivés trop tard pour sauver Tehi. Ils ont ramené
vers les cases une jeune mère folle de douleur et d'horreur.
Mais fendant le groupe d'amis qui essaient de réconforter la malheureuse, une
autre femme s'avance, portant dans ses bras un petit garçon semblable au
pauvre Tehi. La jeune femme contemple avec amour le bébé qu'elle porte.
Pourtant, arrivée près de la mère en pleurs, elle lui dit simplement
- Tiens, prends-le...
je te le donne pour remplacer l'enfant que tu as perdu.
Et cette coutume s'est généralisée et perpétuée à travers les siècles,
déformée aussi...
- Tu as compris maintenant ce que signifie pour une Tahitienne, donner ou
recevoir un enfant ? demande Touria.
( in Tahiti ou la
joie de vivre de Georges de Caunes et Bernar Borderie Pierre
Horay edit 1957)
Mais je m'égare...
les p'tits copains de Nat
...et je reprend la suite de la
liste de nos hôtes : outre les deux
petites fleurs nous fîmes connaissance de la petite Tehani ( caresse de
fleur 5 ans) fille de Colette qui en pince déjà pour Nat et deux garçons
Tamahere( enfant aimé) et Eperona (
oiseau du large..) une dizaine d'année chacun et le voluptueux Teiki ( enfant roi) 12
ans ... (qui a vrai dire m'a
tapé dans l'oeil...)
...et puis toute une flopée d' oncles des tantes... tanés par le soleil et la vie rude pour les
hommes... un peu grasses et lascives pour les femmes...
mais d'une telle gentillesse qu'on peut tout leur pardonner
les ados eux ...étaient principalement encore au Lycée... soit sur l'ile d'à côté... soit à Papeete
bref le soir on avait toujours avec qui parler...
autour du feu ou du four Marquisien OMU KAÏ... qui donne une nourriture délicieuse et pas
grasse...
même si l'on a l'habitude içi de forcer un peu sur la bière on a le sens de la
"bringue" de la fête... de la chanson et de la communion orale...
Certains préfèrent boire
le "kava" la boisson traditionnelle qui revient en force depuis qu'on a
trouvé qu'elle était bonne pour la santé ...
une boisson qui fait planer...
et qui rend "fiu" après... comme après l'amour... ( et il
ne faut
jamais déranger quelqu'un de fiu...sous peine de le voir de mauvaise humeur !)...bien
que le Paka (hash) ait tendance à le détrôner
Au long des jours et de notre acceptation nous fûmes souvent invités à venir voir chacun
des membres de la "famille"
individuellement chez eux... certains artisans
sculptant le bois avec habileté ( un peu surchargé à mon goût)
d'autres cultivateurs ( vanille coprah) nous ont expliqué et fait visiter leurs
plantations et puis les pêcheurs ...qui furent fort étonnés
que nous "marins "au long cours" ne pratiquions pas la pêche ...
nous leur avons expliqué... mais pour eux cela va de soi...il faut vivre !