D’où venons-nous? Qui sommes-nous? Où allons-nous?

 

" Dieu n’appartient ni au savant, ni au logicien.
Il est aux poètes, au Rêve.
Il est le symbole de la beauté, il est la beauté même"


Telle est la devise de Paul Gauguin homme écorché,  éperdument en recherche du Vrai seul, capable de cautériser ses blessures  en rêvant d'un monde nouveau, fraternel, sensuel, sensible et Vrai...

un message qu'illustre sa grande toile- testament  intitulée : D’où venons-nous? Qui sommes-nous? Où allons-nous?

interrogation pascalienne et toute la philosophie de Paul...
terrible cri de souffrance  aussi...

" Qu'ils regardent.... ( les spectateurs) ...si toutefois ils ont un cœur pour sentir) et ils verront ce qu'il y a de souffrance résignée. Ce n'est donc en rien un cri humain "  dira un de ses amis.

Le sens profond de cette toile est l'atroce désespoir de l'homme, tel celui de Verlaine: " Un sommeil noir tombe sur ma vie. Dormez, tout espoir, Dormez, toute envie".

Détaché de toute sa famille,
ayant perdu sa fille préférée Aline,
réduit à l'ultime désespoir, malade de la Syphilis aux douleurs atroces, réduit à la misère, vivant dans l'angoisse de ne pas recevoir (ou si peu) d'argent des tableaux qu'il envoie en France, Gauguin, décidé au suicide, a travaillé à cette toile ...son testament spirituel.
Un magnifique témoignage de la condition humaine...

Durant tout le mois de Décembre il travailla jour et nuit " dans une fièvre inouïe "

" J'y ai mis là avant de mourir toute mon énergie, une telle passion douloureuse dans des circonstances terribles et une vision tellement nette, sans corrections, que le hâtif disparaît et que la vie en surgit ".

Alors il explique : " Tout se passe au bord d'un ruisseau sous-bois. Dans le fond, la mer puis les montagnes de l'île voisine. A droite et en. bas un. bébé endormi puis trois femmes accroupies. Deux figures habillées de pourpre se confient leurs réflexions.
Une figure énorme volontairement et malgré la perspective, accroupie, lève le bras en l'air et regarde étonnée ces deux personnages qui osent penser à leur destinée.
Une figure au milieu cueille un fruit.
Deux chats près d'un enfant, une chèvre blanche.
L'Idole, les deux bras levés mystérieusement et avec rythme, semble indiquer l'au- delà.
Une figure accroupie semble écouter l'idole ...
et une vieille près de la mort semble accepter, se résigner à ce qu'elle pense et termine la légende ;
à ses pieds un. étrange oiseau blanc tenant en sa patte un lézard représente l'inutilité des vaines paroles humaines ".

 Le symbole n'est pas littéraire mais sensible; Il traduit son rêve,  poème musical qui se passe de libretto . Ainsi la nature entière " régnant en notre âme primitive" est l'idole, " consolation imaginaire de nos souffrances en ce qu'elles comportent de vague et d'incompris devant le mystère de notre origine et de notre avenir....
ce que l'occident appelle "dieu"

Il achève sa toile.
Puis absorbe d'un trait l’arsenic qu’on lui avait donné .
Il veut mourir.
Il veut en finir

Les vomissements le sauvent de l’empoisonnement.

Il est « condamné à vivre». [on comprend pourquoi cet artiste est proche de Jess n.d.l.r.]

Il est alors encore à Tahiti qu'il décide de quitter afin de trouver ailleurs un nouveau départ... une nouvelle vie... une fois encore ...un ultime tentative d'espérer...

.C’est aux Marquises qu’il s’installe, dans la petite île de Hiva Oa.
 Pau'ura la jeune compagne( qui remplace Téhura) en ce deuxième séjour refusant de le suivre.
Il s'y fait construire une résidence magnifique comme on n'en a jamais vue aux Marquises. Ce qui constitue l'originalité principale de ce bâtiment, de 13 mètres de long sur 6 mètres de large, est qu'il a un étage. Au rez-de-chaussée, deux pièces fermées, d'un côté la cuisine et de l'autre un atelier de sculpture, sont séparées par la salle à manger, sans murs extérieurs ce qui en fait un endroit très frais et aéré. Le premier étage comprend une petite chambre à coucher et un vaste atelier avec de larges baies. Autour de la porte d'entrée, Gauguin place cinq panneaux de bois sculptés, dont un en guise de linteau, sur lequel les missionnaires scandalisés et les colons amusés peuvent lire cette inscription : MAISON DU JOUIR.

Ce nom convient à merveille car, attirés par les rasades de vin que Gauguin leur dispense généreusement, les hommes et les femmes du village viennent bavarder, chanter et danser tous les soirs. Selon un scénario devenu classique, le peintre ne tarde pas à installer chez lui à demeure une jeune fille de quatorze ans qui porte un nom français, Marie-Rose, car elle est pensionnaire à l'école catholique d'Atuona. Bien sûr, très vite, elle est enceinte. Le dénouement est cette fois un peu différent : Marie-Rose rentre chez ses parents, dans la vallée d'Hekeani, pour y accoucher et y reste.

Les « bringues » continuelles dans la Maison du jouir et l'enlèvement de Marie-Rose ont provoqué la colère du tout-puissant évêque des Marquises. Gauguin riposte en taillant dans deux morceaux de bois d'affreuses caricatures de l'évêque et d'un des pères. Mais les missionnaires font également preuve d'un esprit caustique car, à partir de ce moment, ils ne disent plus « Gauguin » mais « Coquin ». Pire encore sont ses démêlés avec les gendarmes à qui a été confié la tâche impossible et absurde de civiliser, à l'aide du code Napoléon, les restes pitoyables d'un peuple aux moeurs totalement différentes et qui, de surcroît, ignore la langue française. Automatiquement, Gauguin prend la défense des Marquisiens qui, certes peuvent s'enivrer et se battre sauvagement, mais qui, le plus souvent, ne sont coupables d'autre crime que d'ignorer le flot des lois, d'arrêtés et de décrets, pris à Papeete ou à Paris, et que les interprètes n'arrivent jamais à leur expliquer.

Comme toujours... et comme tout le temps dans cette île il retrouve les mêmes blocages, les mêmes pesanteurs qui empêchent les hommes d'être heureux et libres... conseillant même aux habitants de cesser de payer l'impôt

Comme sa grand-mère, Flora Tristan, il devient le défenseur des faibles ....Nouveau Don Quichotte des causes impossibles... seul... contre tous

L’égérie du socialisme naissant, Flora Tristan, celle qu’on appela « la fille des rayons et des ombres» et qui de 1840-44 parcouru l’Europe, les indes et le Pérou était en effet sa grand-mère maternelle
De ces voyages elle publia en son temps «Pérégrination d’une paria» qui raconte ses aventures et ses rancoeurs.
Elle entreprit une tournée à travers la France pour parler aux travailleurs des idées qu’elle avait pour lutter contre la misère et pour obtenir l’émancipation des femmes .
Avant d'être interdite de réunion, et de mourir foudroyée par une congestion cérébrale à Bordeaux.

Paul Gauguin a de qui tenir...

Aux Marquises terme du combat qu’il livra contre la Société coloniale de son temps, il sera vaincu une nouvelle fois ... condamné à 3 mois de prison et 500 francs d’amende

N'ayant plus alors le goût de peindre. Il fera cependant appel mais il devancera par la mort le jugement des hommes. mourrant seul dans sa case..... d'une overdose de morphine...

<<Koké ( son surnom en Marquisien) est mort, il n'y a plus d'hommes>> s'écrira son voisin et ami Tiokâ

Sur la tombe, on a déposé un bloc de pierre ou est gravé son nom et l’année de sa mort (1903). Ses biens et ses toiles furent dispersés aux enchères; La plupart de ses dessins et de ses sculptures jetées «aux ordures».

Dans sa révolte contre une conception de la peinture " témoin du réel ", il avait ouvert les voies suivies par les symbolistes , puis par les fauves et les allemands. Il s'était attaché à entraîner l'artiste vers cette force intérieure qui doit être l'unique objet de l'art. Son exemple connaîtra une exceptionnelle postérité.

Le temps a apporté à Paul Gauguin la gloire qu’il voulait conquérir. Dieu merci

Il était né en 1848 le 7 Juin
Sa mère était la fille de l'égérie révoltée qui épousa Clovis Gauguin,journaliste du National.
Cette année-là, les ouvriers français avaient fait élever par souscription un monument à Flora Tristan dans le cimetière de Bordeaux.
15 jours plus tard, les barricades se dressaient dans Paris à la suite de l’abolition des ateliers nationaux.
Le Prince Louis Napoléon Bonaparte, élu Président de la République étouffait la révolte par son coup d’Etat. Clovis Gauguin et ses camarades du National, organe du parti Radical n’avaient d’autre issue que l’exil

En 1849, la famille Gauguin, embarque donc pour le Pérou. Le voyage qui était déjà à l'époque une aventure devait tourner au drame.:à la pointe de la Patagonie, Clovis s’écroulant, emporté par une rupture d ’anévrisme.
Aline, sa jeune veuve et ses 2 enfants fut heureusement accueillie à Lima par son grand-oncle, Don Pio, dont la famille était une des plus puissantes du Perou.

Paul va s’éveiller à la vie péruvienne pendant 6 ans. Puis à la mort de ce grand-oncle, les Gauguin rentrent en France.
 Ce retour au sol natal est pour Paul un dépaysement....et un arrachement, un déracinement: Il comprend mal le français et prend peu d’intérêt à l’étude.
Il brode, il imagine, il rêve.
 « l’Inca est venu tout droit du soleil et j’y retournerai»...et se réfugie dans la nostalgie des voyages.

A 17 ans, il s’engage dans la marine marchande.
De ce quai du Havre ou s’était embarqué Manet en 1848, comme matelot, Paul voit à son tour s’éloigner les côtes de France;
La destination est la même : Rio de Janeiro.
En retrouvant le continent de son enfance, le jeune matelot est heureux.
Par le détroit de Magellan, à Port -Famine, Paul se rend sur la tombe de son père;...puis se dirige vers Panama , les îles polynésiennes... les Indes.
Là; Il apprend que sa mère s’est éteinte.

Il rentre alors en France où sa soeur l’attend.
La guerre contre la Prusse vient d’éclater. ...La maison de St Cloud où vit sa soeur a été incendiée par les prussiens.
Paul Gauguin reprend la vie à zéro. et s'initie à la peinture auprès d' Arosa, un ami de la famille devenu son tuteur à la mort de sa mère et qui va dans la foulée lui trouver une situation chez l'agent de change Bertin
Cet emploi lui offre une vie aisée, jusqu'au krach de 1882.

Il fait la rencontre d'une jeune danoise , Mette-Sophie Gad, qu’il épouse en 1873. Elle lui donnera 5 enfants.
Avec son ami Emile Schuffenecker, un collègue de bureau, peintre amateur, il va peindre en banlieue. Chez les Arrosa, il rencontre Pissarro qui lui conseille de peindre clair .
En tant que collectionneur, il se montre audacieux achetant très tôt des oeuvres de Pissarro, Manet, Monet, Renoir, Sisley, Guillaumin, Cassatt, Degas et Cézanne. Il gagnera particulièrement l'amitié de Pissarro et de Degas, ce dernier restant, en dépit d'une brouille passagère, l'un de ses plus ardents défenseurs, lui achetant à plusieurs reprises des toiles.

En tant que peintre, sa peinture restera très proche de celle de son mentor, Pissarro, jusque vers 1883.
Il devra à l'impressionnisme son sens de la lumière de plein air, la luminosité de ses couleurs, et son indépendance à l'égard des conventions.
Face à la «bande à Manet » il se tient sur ses gardes. Il ne veut pas se rallier à leur peinture nouvelle. Il veut s’affirmer en chef. Son tempérament l’écarte des subtilités de Monet.
Il rencontre Puvis de Chavannes, regarde peindre Cézanne auprès de Pissarro à Pontoise, s’oppose à Manet qui le traite de dictateur..

Gauguin lâche la Bourse après l’ébranlement des marchés financiers en 1882.Il décide alors de se consacrer entièrement à la peinture. C’est pour lui une nouvelle aventure qui commence; Seul le triomphe peut-en être l’issue.
Mais très vite il rencontre des difficultés. Sa femme, Mette perd confiance et décide de rentrer au Danemark. Gauguin va commencer l’apprentissage de la misère et de la solitude.

Dans le froid de l’hiver, il se retrouve seul avec son fils, n’ayant pour subsister que du pain. L’enfant fiévreux tombe malade. Le père le soigne comme il peut. L’épreuve de la misère ne parviendra pas à l’abattre. Il n’a qu’une certitude : sa peinture.
Il se brouille avec Seurat et du même coup refuse d’exposer au salon des indépendants dont Seurat est le Président. Avec le peu d’argent qui lui reste, il décide d’aller vivre en Bretagne.

Le premier séjour à Pont-Aven va durer tout l’été.

Gauguin prend pension à l’Auberge Gloanec; il emploie ses loisirs à l’escrime, à la boxe et à la nage - mais aussi à sa peinture. Il expose parfois, entre quelques sarcasmes des autres peintres «salonnards sans imagination» ses idées au cours des longues soirées dans la salle d’auberge où les peintres se réunissent. Il y a là Emile Bernard, Charles Laval.
Ce dernier lui vante les terres ensoleillées des Tropiques et cette île Tobago, en face de Panama. Il partira pour cette île en espérant y vivre comme des sauvages « sans inquiétude du jour ni du lendemain».
Très vite, il déchantera de ses espérances.

A court d’argent, il se fait embaucher comme terrassier au creusement du canal de Panama. Son but? Amasser un peu d’argent et partir pour la Martinique. Il y parviendra et s’installera en compagnie de Laval à St Pierre.

Tous deux tomberont malades; atteints de dysenterie et de fièvre paludéenne contractées à Panama. « Je suis dans une case à nègre, couché sans force, sur une paillasse sans un sou «. il continue pourtant à peindre. « Jamais je n’ai eu une peinture aussi claire»

De retour en France, il va s’installer de nouveau à l’auberge Gloanec; Les peintres sont revenus. Gauguin tombe amoureux de la fille d’Emile Bernard, Madeleine. Elle a 17 ans.

Bernard a des idées qui rejoignent celles de Gauguin et peut-être les influencent. D’où le différend qui 3 ans plus tard brisera leur amitié. Le génie instinctif de Gauguin prend mieux conscience à la lumière des théories de Bernard.

 

Depuis des mois, Vincent Van Gogh le presse de venir le rejoindre à Arles, où il pourrait travailler à bon compte, tandis que Théo Van Gogh assurerait nourriture et logement contre une part de sa production. Il décide de gagner Arles.

Un matin d’automne, Gauguin est là, sûr de lui, méfiant, pas un mot de remerciement pour Vincent Van Gogh qui a préparé sa venue avec tant d’amour. Paul regarde distraitement les toiles dont Vincent a décoré la maison. c’est un homme aigri. il critique tout: le pays, les gens,les relations de Vincent.
Puis les discussions éclatent, les relations se tendent. et c'’est le drame. Le 24 Décembre, en pleine place, Vincent se précipite sur Gauguin un rasoir à la main avant de se trancher l’oreille dans un geste d’autodestruction.
Gauguin repart pour Paris laissant Vincent à son triste sort.

Après un court séjour au Pouldu il s’embarque seul pour Tahiti. Rien ne peut le retenir, pas même cet amour tout neuf que lui apporte Juliette Huet, une petite couturière.
Il débarque à Papeete et s’installe à Mataïea. Il loue une case, au pied de la montagne et des végétations aux couleurs éblouissantes : l’éclat des mangues et du tiaré, les fougères arborescentes et les pandanus aux larges feuilles s’étendent auprès des eaux du lagon au bleu profond.

Un jour, une jeune fille rentre dans sa case,; elle a 13 ans; C’est Téhura. Elle deviendra son modèle, puis son épouse. C’est par elle qu’il va rentrer dans la phase essentielle de son oeuvre. En quelques mois, il brossera 70 toiles qui seront toutes, au delà de la féerie des formes et des couleurs, un appel mystique aux dieux oubliés.

Gauguin fait une demande en mariage en ces termes admirablement directs et précis.

- Tu n'as pas peur de moi ?
- Non.
- Veux-tu toujours habiter ma case ?
- Oui.
- Tu n'as jamais été malade ?
- Non.

Les parents sont un peu plus difficiles. Ils exigent que la première semaine soit une période d'essai qui décidera de l'avenir. A la grande joie de Gauguin, ces quelques jours passés, Teha'amana le vrai nom de de Téhura reste avec lui. « je me remis au travail et le bonheur succédait au bonheur », écrit-il. « Chaque jour au petit lever du soleil, la lumière était radieuse dans mon logis. L'or du visage de Teha'amana inondait tout l'alentour et tous deux dans un ruisseau voisin nous allions naturellement, simplement comme au Paradis nous rafraîchir... Teha'amana se livre de plus en plus, docile, aimante, la noa noa tahitien embaume tout. »

Teha'amana ne tarde pas à se trouver enceinte et la nonchalance avec laquelle elle prend ce contretemps est une nouvelle occasion pour Gauguin de l'apprécier davantage. Sans faire trop d'entorse à la vérité, il peut annoncer l'événement en ces termes : « je vais bientôt être père à nouveau en Océanie. Nom de nom ! Il faut donc que le sème partout. Il est vrai qu'ici il n'y a pas de mal, les enfants sont bien reçus et retenus d'avance par tous les parents. C'est à qui sera le papa et la maman nourriciers. Car vous savez qu'à Tahiti le plus beau cadeau qu'on puisse faire, c'est un enfant. » D'autre part, aucune réprobation ne frappera une femme qui se fait avorter et c'est la solution que Teha'amana choisit.

La grâce calme de l'attitude, la noblesse mesurée du geste, la gravité de porteuse d'offrandes de ces Tahitiennes s'expriment par l'admirable cadence des verticales, des horizontales, la douceur des courbes unissant l'instinctive force du primitif à la plus pure tradition de la peinture française.
Jamais peut-être Gauguin n'a atteint une maîtrise aussi parfaite de son art pour exprimer cette harmonie particulière, cette " rigidité statuaire " des femmes maories, qui, à défaut de beauté traditionnelle, ont, écrivait-il, " un je ne sais quoi d'ancien, d 'auguste, de religieux dans le rythme de leurs gestes, dans leur immobilité rare. Dans des yeux qui rêvent, la surface trouble d' une énigme insondable ".

Il vient chercher une vision de nature absolument nouvelle,
une solitude qui lui permettent de donner à son imagination une pâture nouvelle pour son rêve intérieur.
Et par là il devient un grand poète, tel que le définira Mallarmé : " ...un homme qui s'isole pour sculpter son propre tombeau ".

Sa recherche va dans le sens d'une simplification des formes, il élimine les détails pour ne garder que la forme essentielle, une simplification obtenue par l'usage du cerne et de l'aplat de couleur.
La richesse de sa palette en nuances de lumière et d' ombres bleues et vertes sur la peau nue sont caractéristiques

Dès Pont-Aven, Paul Gauguin renonça à l'impressionnisme pour élaborer, influencé par le peintre Emile Bernard et par le courant symboliste, une nouvelle théorie picturale, le "Synthétisme".qui veut faire place au symbole dans cet "ailleurs",

Fasciné par le charme indolent des beautés tahitiennes il peint une Océanie paradisiaque (que l'arrivée des Occidentaux avait déjà pourtant grandement commencée à détruire).
Gauguin s'y affranchit avec une liberté et un naturel inégalés de la peinture occidentale par son style primitif et la prodigieuse invasion des couleurs (les sols pourpres et lilas , les murs jaunes etc......).
Mais parfois le côté provincial de cette lointaine colonie française lui rappelle cruellement une civilisation qu'il croyait avoir laissée derrière lui : "l'imitation, grotesque jusqu'à la caricature, de nos moeurs, modes, vices et ridicules civilisés... Avoir fait tant de chemin pour trouver cela même que je fuyais!» (extrait de Noa-Noa).

C'est dans sa case de la "maison du jouir" qu'il mourut le 8 mai 1903 à Hiva Oa, une des îles Marquises.

"La couleur qui est vibration de même que la musique" , ces mots de Paul Gauguin illustrent bien l'usage si particulier qu'il fait du rose, son amour de plus en plus vif pour l'indigo et le jaune citron, la profondeur de ses ocres rouges, le balancement du vert du suraigu au très grave, ses harmonies sombres, presque sourdes, déchirées par des dissonances.
 L'envie s'impose d'écouter sonner la peinture dans toute sa puissance.
 On s'en étonne, on s'en pénètre, on en jouit.

Les tableaux peints en Polynésie, que l’on a longtemps pris pour des illustrations d’une mythologie et d’un folklore précis, sont en grande partie des fictions.
Dans un texte intitulé « Songeries », Gauguin met en scène un visiteur découvrant ses toiles océaniennes : « Oui, voici Tahiti, par une figuration, une transposition de la réalité objective en un tempérament [...] voilà ce que nous nommons la réalité - une fiction multiforme ! [...] voici donc Tahiti fidèlement imaginée ».

Les sources iconographiques utilisées par le peintre sont multiples. Gauguin assimile non seulement des oeuvres antiques ou extra-européennes sans rapport direct avec Tahiti, mais aussi des productions de peintres français du XIXe siècle. La collection de son tuteur Gustave Arosa a joué dans ce dernier cas un rôle important. Elle comprenait entre autres des tableaux de Delacroix, de Courbet et de Millet. On relève les multiples emprunts faits par le peintre à ces toiles qu’il connaissait et appréciait.

A la recherche d’un passé qu’il imagine glorieux mais dont rien ne subsiste, Gauguin recrée un univers iconographique composé de références aux grandes cultures de l’Antiquité. Ce syncrétisme touche également sa conception de la religion, bouddhisme et culte maori pouvant coexister dans une même oeuvre .
Que Gauguin ne se soit pas contenté de ce qu’il avait sous les yeux n’a rien d’étonnant en soi ; le refus de l’observation directe et l’utilisation de photographies le confortent dans son rejet de l’Impressionnisme. Lorsqu’à la Martinique il peint la baie de Saint-Pierre, c’est en dissimulant la ville derrière de grands arbres, pour donner de l’île l’image d’une terre inhabitée et sauvage .

A la question d'un journaliste le 15 mars 1895  qui lui demandait:"Pourquoi êtes-vous allé à Tahiti?",Gauguin répondit:"J'avais été séduit une fois par cette vierge et par le naturel de ses habitants, leur charme empreint de simplicité;j'y suis retourné et je vais y retourner encore. Pour faire neuf,il faut remonter aux sources,à l'humanité en enfance. L'Eve de mon choix est presque un animal;voilà pourquoi elle est nue dans une attitude spontanée,naturelle..."


 

Ivre d'absolu, de vrai d'être et de jouissance ...

deux liens intéressant pour poursuivre...

Des détails sur sa période tahitienne

Un interview fictif

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