Le Royaume de Dieu est au dedans de vous (Luc
17, 21) dit Le Seigneur.
Revenez à Dieu de tout votre coeur, laissez-là ce misérable monde, et votre âme
trouvera le repos.
Apprenez à mépriser les choses extérieures et à vous donner aux intérieures, et vous verrez le Royaume de Dieu venir en vous !
Car le Royaume de Dieu est Paix et Joie dans l'Esprit Saint (Rom. 14,17): ce qui
n'est pas donné aux impies.
Jésus-Christ viendra à vous, et Il vous remplira de Ses consolations, si vous Lui
préparez au dedans de vous une demeure digne de Lui.
Toute Sa gloire et toute Sa beauté est intérieure (Ps 44,14); et c'est
dans le secret du coeur qu'Il se plait.
Il visite souvent l'homme intérieur, et Ses entretiens sont doux, Ses consolations
ravissantes... Sa Paix est inépuisable, et Sa familiarité incompréhensible.
2. Ame fidèle, hâtez-vous donc de préparer votre coeur
pour l'Epoux, afin qu'Il daigne venir et habiter en vous !
Car il a dit: Si quelqu'un M'aime, il gardera Ma Parole, et Nous viendrons à lui, et
Nous ferons en lui Notre demeure (Jean 14, 23)...Laissez donc entrer Jésus en vous,
et n'y laissez entrer que Lui !
Lorsque vous posséderez Jésus, vous serez riche, et Lui
seul vous suffit.
Il veillera sur vous, Il prendra de vous un soin fidèle en toutes choses, de sorte que
vous n'aurez plus besoin de rien attendre des hommes.
Car les hommes changent vite... et vous manquent tout d'un
coup; mais Jésus-Christ demeure éternellement (Jean 12,34)... inébranlable
dans Sa constance... Il est près de vous jusqu'à la fin !
3. On ne doit guère compter sur un homme fragile et mortel,
encore bien qu'il nous soit utile et que vous soyez cher l'un à l'autre, et il n'y a pas
lieu de s'attrister beaucoup si quelquefois il vous traverse et s'élève contre vous.
Ceux qui sont aujourd'hui pour vous pourront demain être contre vous, et réciproquement
... les hommes changent comme le vent !
Mettez en Dieu toute votre confiance; qu'Il soit votre crainte et votre amour !
Il répondra pour vous, et fera ce qui est le meilleur.
Vous n'avez point ici de demeure stable (Hebr.13, 14): en quelque lieu que vous
soyez, vous êtes étranger et voyageur... et vous n'aurez
jamais de repos tant que vous ne serez pas unis intimement à Jésus-Christ !
4. Que cherchez-vous autour de vous ? Ce n'est pas ici le
lieu de votre repos !
Votre demeure doit être dans le Ciel, et vous ne devez regarder toutes les choses de la
terre que comme en passant.
Tout passe, et vous passerez avec tout le reste !
Prenez garde de vous attacher à quoi que ce soit, de peur d'en devenir l'esclave
et de vous perdre !
Que sans cesse votre pensée monte vers le Très-Haut, et votre prière vers
Jésus-Christ.
Si vous ne savez pas encore vous élever aux contemplations célestes, reposez-vous dans
la Passion du Sauveur, et aimez à demeurer dans ses plaies Sacrées.
Car si vous vous réfugiez avec amour dans ces plaies et ces précieux stigmates, vous
sentirez une grande force au temps de la tribulation... vous vous inquiéterez peu du
mépris des hommes, et vous supporterez aisément les paroles médisantes.
5. Jésus-Christ a été méprisé des hommes en ce monde
et, dans les plus extrêmes angoisses, abandonné des siens, de Ses amis, de Ses proches,
au milieu des opprobres.
Jésus-Christ a voulu souffrir et être méprisé... et vous
osez vous plaindre de quelque chose !
Jésus-Christ a eu des ennemis et des détracteurs... et vous ne voudriez avoir que des
amis et des bienfaiteurs !
Comment votre patience méritera-t-elle d'être couronnée, s'il ne vous arrive rien de
pénible ?
Si vous ne voulez rien souffrir, comment serez-vous ami de
Jésus-Christ ?
Souffrez avec Jésus-Christ et pour
Jésus-Christ, si vous voulez régner avec Jésus-Christ !
6. Si une seule fois vous étiez entré bien avant dans le
coeur de Jésus, et que vous eussiez ressenti quelque mouvement de Son Amour... que vous
auriez peu de souci de ce qui peut vous contrarier ou vous plaire ! ...vous vous
réjouiriez d'un outrage reçu, parce que l'Amour de Jésus apprend à l'homme à se
mépriser lui-même !
Celui qui aime Jésus et la Vérité, un homme vraiment intérieur et dégagé de toute
affection déréglée, peut librement s'approcher de Dieu, et... s'élevant en esprit au
dessus de soi-même, se reposer en Lui par une jouissance anticipée.
7. Celui qui estime les choses suivant ce qu'elles sont, et non d'après les discours et l'opinion des hommes,
est vraiment sage ; c'est Dieu qui l'instruit plus que les hommes !
Celui qui vit au dedans de lui-même, et qui s'inquiète peu des choses du dehors,...tous
les lieux lui sont bon, et tous les temps, pour remplir ses pieux exercices !
Un homme intérieur se recueille bien vite, parce qu'il ne se répand jamais tout entier
au dehors.
Les travaux extérieurs, les occupations nécessaires en certain temps, ne le troublent
point; mais il se prête aux choses selon qu'elles arrivent.
Celui qui a établi l'ordre au dedans de soi ne se tourmente guère de ce qu'il y a de
bien ou de mal dans les autres.
L'on a de distractions et d'obstacles qu'autant que l'on s'en crée
soi-même.
8. Si vous étiez ce que vous devez être, entièrement
libre et détaché, tout contribuerait à votre bien et à votre avancement.
Mais beaucoup de choses vous déplaisent et souvent vous troublent, parce que vous n'êtes
pas encore tout à fait mort à vous même et séparé des
choses de la terre...
Rien n'embarrasse et ne souille tant le coeur de l'homme que l'amour impur des créatures !
Si vous rejetez les consolations du dehors, vous pourrez contempler les choses du Ciel et
goûter souvent les joies intérieures .
Inquiétez vous peu qui est
pour vous ou contre vous ; mais prenez soin que Dieu soit avec vous en tout ce que vous faites.
Ayez la conscience pure, et Dieu prendra votre défense.
Toute la malice des hommes ne saurait nuire à celui que Dieu veut protéger.
Si vous savez vous taire et souffrir, Dieu, sans aucun doute, vous assistera.
Il sait le temps et la manière de vous délivrer; abandonnez-vous donc à Lui.
C'est de Dieu que vient le secours; c'est Lui qui délivre de la confusion.
Il est souvent très utile, pour nous retenir dans une plus grande humilité, que les
autres soient instruits de nos défauts, et qu'ils nous les reprochent.
2. Quand un homme s'humilie de
ses défauts, il apaise aisément les autres et se réconcilie sans peine ceux qui sont
irrités contre lui.
Dieu protège l'humble et le délivre... Il aime l'humble et le console... Il s'incline
vers l'humble et lui prodigue Ses Grâces, et, après l'abaissement, Il l'élève dans la
Gloire.
Il révèle à l'humble ses secrets... Il l'invite et l'attire doucement à Lui.
Quelque affront qu'il reçoive, l'humble vit encore en Paix, parce qu'il s'appuie sur Dieu
et non sur le monde.
Ne pensez pas avoir fait de progrès, si vous ne vous croyez au-dessous de tous les autres !
Conservez-vous premièrement
dans la Paix, et alors vous pourrez la donner aux autres.
Le pacifique est plus utile que le savant !
Un homme passionné change le bien en mal et croit le mal aisément.
L'homme paisible et bon ramène tout au bien.
Celui qui est affermi dans la Paix ne pense mal de personne ... mais l'homme inquiet et
mécontent est agité de divers soupçons... il n'a jamais de repos et n'en laisse point
aux autres.
Il dit souvent ce qu'il ne faudrait pas dire, et ne fait pas ce qu'il faudrait faire.
Attentif aux devoirs des autres, il néglige ses propres devoirs.
Ayez donc premièrement du zèle pour vous même, et vous pourrez ensuite avec justice
l'étendre sur le prochain !
2. Vous savez bien colorer et
excuser vos fautes, et vous ne voulez pas recevoir les excuses des autres.
Il serait plus juste de vous accuser vous-même et d'excuser votre frère !
Si vous voulez qu'on vous supporte, supportez aussi les autres !
Voyez combien vous êtes loin encore de la Vraie Charité et de l'Humilité, qui jamais ne
s'irrite et ne s'indigne que contre elle-même !
Ce n'est pas une grande chose de bien vivre avec les hommes doux et bons, car cela plait
naturellement à tous : chacun aime son repos et s'affectionne à ceux qui partagent ses
sentiments.
Mais vivre en paix avec des hommes durs, pervers, sans règle, ou qui vous contrarient...
c'est une grande grâce, une vertu courageuse et digne d'être louée !
3. Il y en a qui sont en Paix
avec eux-mêmes et avec les autres...
Et il y en a qui n'ont point de Paix et qui troublent celle d'autrui... ils sont à charge
aux autres et plus à charge à eux-mêmes.
Il y en a enfin qui se maintiennent dans la Paix et qui s'efforcent de la rendre aux
autres.
Au reste , toute notre Paix dans cette misérable vie, consiste plus dans une souffrance humble que dans l'exemption de la souffrance.
Qui sait le mieux souffrir possédera la plus grande Paix.
Celui-là est vainqueur de soi et maître du monde, ami de Jésus-Christ et héritier du
ciel.
L'homme s'élève au dessus de
la terre sur deux ailes, la simplicité et la pureté.
La simplicité doit être dans l'intention, et la pureté dans l'affection.
La simplicité cherche Dieu, la pureté le trouve et le goûte.
Nulle bonne oeuvre ne vous sera difficile, si vous êtes libre au dedans de toute
affection déréglée.
Si vous ne voulez que ce que Dieu veut et ce qui est utile au prochain, vous jouirez de la
liberté intérieure.
Si votre coeur était droit, alors toute créature vous serait un miroir de vie et un livre rempli
de saintes instructions.
Il n'est point de créature si petite et
si vile qui ne présente quelque image de la bonté de Dieu !
2. Si vous aviez en vous assez
d'innocence et de pureté, vous verriez tout sans obstacle....Un coeur pur pénètre le
ciel et l'enfer.
Chacun juge des choses du dehors selon ce qu'il est au dedans de lui-même.
S'il est quelque joie dans le monde, le coeur
pur la possède.
Et s'il y a des angoisses et des tribulations, avant tout, elles sont connues de la
mauvaise conscience.
Comme le fer mis au feu perd sa rouille et devient tout étincelant, ainsi celui qui se
donne sans réserve à Dieu se dépouille de sa langueur et se change en un homme nouveau.
3. Quand l'homme commence à
tomber dans la tiédeur, alors il craint le moindre travail, et reçoit avidement les consolations du dehors.
Mais quand il commence à se vaincre parfaitement et à marcher avec courage dans la Voie
de Dieu, alors il compte pour rien ce qui lui était le plus pénible.
Nous ne devons pas trop compter sur nous-mêmes, parce que souvent la Grâce et le Jugement nous
manquent.
Nous n'avons en nous que peu de Lumière ...et ce peu il est aisé de le perdre par
négligence.
Souvent nous nous apercevons pas combien nous sommes aveugles au dedans de nous.
A de mauvaises actions souvent nous donnons les pires excuses.
Quelques fois nous sommes mus par la passion, et nous croyons que c'est par le zèle.
Nous relevons de petites fautes dans les autres, et nous nous en permettons de plus
grandes.
Nous sentons bien vite, et nous pesons ce que nous souffrons des autres; mais tout ce
qu'ils ont à souffrir de nous, nous n'y songeons point.
Qui se jugerait équitablement soi-même sentirait qu'il n'a le droit de juger personne
sévèrement.
2. L'homme intérieur préfère
le soin de soi-même à tout autre soin; et lorsqu'on est attentif à
soi, on se tait aisément sur les autres.
Vous ne serez jamais un homme intérieur et vraiment pieux, si vous ne gardez le silence sur ce qui vous est étranger, et si ne vous ne vous occupez
principalement de vous-même.
Si vous n'avez que Dieu et vous-même en vue, vous serez peu touché de ce que vous
apercevrez au dehors.
Où êtes-vous quand vous n'êtes pas présent à vous même ? Et que vous revient-il
d'avoir tout parcouru et de vous être oublié ?...
Si vous voulez posséder la Paix et être véritablement Uni à
Dieu, il faut laisser là tout le reste, et ne penser qu'à vous seul.
3. Vous ferez de grands
progrès, si vous vous dégagez de tous les soins du temps.
Vous serez, au contraire bien vite fatigué si vous comptez pour quelque chose ce qui
n'est que de ce monde.
Qu'il n'y ait rien de grand à vos yeux, d'élevé, de doux, d'aimable, que Dieu seul, ou ce qui vient de Dieu.
Regardez comme une pure vanité toute consolation qui repose sur la créature.
L'âme qui aime Dieu méprise tout ce qui est au dessous de Dieu.
Dieu, seul, éternel, immense, et
remplissant tout, est la Consolation de l'âme et la Vraie Joie
du coeur !
La gloire de l'homme de
bien est le témoignage de sa conscience (II Cor. 1, 12 )
Ayez la conscience pure, et vous posséderez toujours la Joie !
La bonne conscience peut supporter beaucoup de choses, et elle est pleine de Joie dans les
adversités.
La mauvaise conscience est toujours inquiète et troublée.
Vous jouirez d'un repos ravissant, si votre coeur ne vous reproche rien.
Ne vous réjouissez que d'avoir fait du bien !
Les méchants n'ont jamais de véritable Joie... ils ne possèdent point la Paix intérieure,
parce qu'il n'y a point de Paix pour l'impie" (Is 17, 21) dit le Seigneur.
Et s'ils disent: Nous sommes dans la Paix, les maux ne viendront pas sur nous et qui
oserait nous nuire ? (Jér. 5, 12) ne
les croyez pas: car la colère de Dieu
se lèvera soudain, et leurs oeuvres seront réduites à rien... et leurs pensées
périront !
2. Se faire un sujet de gloire
de la tribulation n'est pas difficile à celui qui aime; car se glorifier ainsi, c'est se
glorifier dans la Croix de Jésus-Christ (Rom 5, 3); (Gal 6, 14).
La gloire que les hommes donnent et reçoivent est courte...
La tristesse accompagne toujours la gloire du monde.
La gloire des Bons est dans leur conscience, et non dans la bouche des hommes.
L'allégresse des Justes est de Dieu et en Dieu, et leur Joie vient de la Vérité.
Celui qui désire la Gloire véritable et éternelle dédaigne la gloire du temps.
Et celui qui recherche la gloire du temps et ne la méprise pas de toute son âme, montre
qu'il aime peu la Gloire éternelle...
Il jouit d'une grande tranquillité de coeur, celui que n'émeut ni la louange ni le
blâme.
3. Il sera aisément en Paix et
content, celui dont la conscience est pure !
Vous n'êtes pas plus Saint parce qu'on vous loue, ni plus imparfait parce qu'on vous
blâme.
Vous êtes ce que vous êtes... et tout ce qu'on pourra dire ne vous fera pas plus
grand que vous ne l'êtes aux yeux de Dieu.
Si vous considérez bien ce que vous êtes en vous même, vous vous embarrasserez
peu de ce
que les hommes disent de vous.
L'homme voit le visage; mais Dieu voit le coeur (I Roi.16,7)... L'homme regarde
les actions; mais Dieu pèse l'intention...
Faire toujours bien et s'estimer peu, c'est le signe d'âme humble.
Ne vouloir de consolation d'aucune créature, c'est la marque d'une grande Pureté et
d'une grande confiance intérieure !
4. Quand on ne cherche au
dehors aucun témoignage en sa faveur, il est manifeste qu'on s'est entièrement remis à
Dieu.
Car ce n'est pas celui qui se recommande lui-même qui est approuvé, dit saint
Paul, mais celui que Dieu recommande (II Cor. 10, 18 ) .
Avoir toujours Dieu présent au dedans
de soi et ne tenir à rien au dehors,
c'est l'état de l'homme intérieur.
Heureux celui qui comprend ce
que c'est que d'aimer Jésus, et de se mépriser soi-même à cause de Jésus.
Il faut que notre amour pour Lui nous détache de tout autre amour, parce que Jésus veut
être aimé seul par dessus toutes choses.
L'amour de la créature est trompeur et passe bientôt; l'Amour de Jésus est stable et
fidèle.
Celui qui s'attache à la créature tombera comme elle et avec elle; celui qui s'attache
à Jésus sera pour jamais affermi.
Aimez et conservez pour ami Celui qui ne vous quittera point alors que
tous vous abandonneront... et qui, quand viendra votre fin, ne vous laissera point périr.
Que vous le vouliez ou non, il vous faudra un jour être séparé de tout !
2. Vivant et mourant tenez-
vous donc près de Jésus, et confiez-vous à la Fidélité de Celui qui seul peut vous
secourir lorsque tout vous manquera.
Tel est votre Bien-aimé, qu'Il ne veut point de partage... Il veut posséder seul votre coeur et y régner comme un roi sur le trône qui est à Lui !
Si vous saviez bannir de votre âme toutes les créatures, Jésus se plairait à demeurer
en vous.
Vous trouverez avoir perdu presque tout ce que vous aurez établi sur les hommes et non
sur Jésus...
Ne vous appuyez pas sur un roseau qu'agite le vent et n'y mettez pas votre confiance; car
toute chair est comme l'herbe, et sa gloire passe comme la fleur des champs (Is 40,
6).
Vous serez trompé souvent, si vous jugez des hommes d'après ce qui parait au dehors...
au lieu des avantages et du soulagement que vous cherchiez en eux, vous n'éprouverez
presque toujours que du préjudice !
Cherchez Jésus en tout, et en tout vous trouverez Jésus !
Si vous vous cherchez vous-même, vous vous trouverez aussi... mais pour votre perte.
Car l'homme qui ne cherche pas Jésus se nuit plus à lui-même que tous ses ennemis et
que le monde entier.
Quand Jésus est présent, tout
est doux, et rien ne semble difficile; mais quand Jésus se retire, tout fatigue.
Quand Jésus ne parle pas au dedans, nulle consolation n'a de prix... mais si Jésus dit
une seule parole, on est merveilleusement consolé.
Marie Madeleine ne se leva-t-elle pas aussitôt du lieu où elle pleurait, lorsque Marthe
lui dit:Le Maître est là, Il vous appelle (Jean 11,28 ) ?
Heureux moment où Jésus appelle des larmes à la Joie de l'Esprit !
Combien sans Jésus n'êtes vous point aride et insensible !
Et quelle vanité ! quelle folie si vous désirez autre chose que Jésus-Christ ! Ne
serait-ce pas une plus grande perte que si vous aviez perdu le monde entier ?
2. Que peut vous donner le
monde sans Jésus ?
Etre sans Jésus c'est un insupportable enfer... être avec Jésus c'est un paradis de
délices !
Si Jésus est avec vous, nul ennemi ne pourra vous nuire.
Qui trouve Jésus trouve un trésor immense, ou plutôt un bien au dessus de tout bien.
Qui perd Jésus perd plus et beaucoup plus que s'il perdait le monde entier...
Vivre sans Jésus c'est le comble de l'indigence... être uni à Jésus c'est posséder
des richesses infinies.
3. C'est un grand art que de
savoir converser avec Jésus, et une grande prudence que de savoir Le retenir près de
soi.
Soyez humble et pacifique, et Jésus sera avec vous.
Que votre vie soit pieuse et calme, et Jésus demeurera près de vous.
Vous éloignerez bientôt Jésus et vous perdrez Sa Grâce, si vous voulez vous répandre
au dehors.
Et si vous L'éloignez et Le perdez, qui sera votre refuge ? et quel autre ami
chercherez-vous ?
Vous ne sauriez vivre heureux sans ami... et si Jésus n'est pas pour vous un ami au dessus de tous les autres... n'attendez que tristesse et désolation !
Qu'insensé vous êtes, si vous mettez en quelque autre votre confiance ou votre joie !
Il vaudrait mieux avoir le monde entier contre vous que d'être dans la disgrâce de
Jésus.
Qu'Il vous soit donc plus cher que tout ce qui vous est cher !
4. Aimez tous les autres pour Jésus, et Jésus pour Lui-même.
Lui seul doit être aimé uniquement, parce qu'Il est le seul Ami bon, fidèle entre tous
les amis.
Aimez en Lui et à cause de Lui vos amis et vos ennemis, et priez-Le pour tous , afin que
tous Le connaissent et L'aiment.
Ne souhaitez jamais obtenir aucune préférence dans l'estime ou l'amour des hommes... car
celà n'appartient qu'à Dieu, qui n'a point d'égal.
Ne désirez point que quelqu'un s'occupe de vous dans son coeur, et ne soyez vous-même
préoccupé de l'amour de personne... mais que Jésus soit en vous et en tout homme de
bien.
5. Soyez pur et libre au
dedans, sans aucune attache à la créature.
Il vous faut être dépouillé de tout et offrir à Dieu un coeur pur, si vous voulez
être libre et goûter combien le Seigneur est doux.
Et certes, jamais vous n'y parviendrez, si Sa grâce ne vous prévient et ne vous
attire... de sorte qu'ayant exclu et banni tout le reste... vous soyez seul uni à Lui
seul.
Car lorsque la Grâce de Dieu visite l'homme, alors il peut tout
!... et quand elle se retire, alors il est pauvre et infirme, et ne semble réservé
qu'aux châtiments.
En cet état même, il ne doit ni se laisser abattre ni désespérer... mais il doit se soumettre avec calme à la Volonté de Dieu et souffrir, pour l'Amour
de Jésus-Christ, tout ce qui lui arrive... car l'été succède à l'hivers, après la
nuit revient le jour, et après la tempête une grande sérénité...
Il n'est pas difficile de mépriser les
consolations humaines, quand on jouit des consolations divines.
Mais il est grand et très grand de consentir à être privé tout à la fois des consolations des hommes et de celles de Dieu, de supporter
volontairement pour Sa Gloire cet exil du coeur, de ne se rechercher en rien, et de
ne faire aucun retour sur ses propres mérites.
Qu'y a-t-il d'étonnant si vous êtes rempli d'allégresse et de ferveur lorsque la Grâce
descend en vous ?
C'est pour tous l'heure désirable.
Il avance aisément et avec joie celui que la Grâce soulève !
Comment sentirait-il son fardeau, quand il est porté par le Tout-Puissant, et conduit par
le Guide Suprême ?
2. Toujours nous cherchons quelque
soulagement, et difficilement l'homme se dépouille de lui-même.
Fidèle à son évêque le Saint martyr Laurent vainquit le siècle, parce qu'il méprisa
tout ce que le monde offre de séduisant... et qu'il souffrit en Paix pour l'Amour de
Jésus-Christ d'être séparé du souverain prêtre de Dieu, de Sixte qu'il aimait avec
une vive tendresse.
Par l'Amour du Créateur surmontant l'amour de l'homme, aux consolations humaines il
préféra le bon plaisir divin !
Et vous aussi, apprenez donc à quitter, pour l'Amour de Dieu, l'ami le plus cher et le
plus intime.
Et ne murmurez point s'il arrive que votre ami vous abandonne... sachant qu'après tout,
il faut bien un jour se séparer de
tous.
3. Car ce n'est point sans combattre beaucoup et longtemps en lui-même, que l'homme apprend à se vaincre pleinement,
et à reporter en Dieu toutes ses affections.
Lorsqu'il s'appuie sur lui-même, il se laisse aisément aller aux consolations humaines.
Mais celui qui a vraiment l'Amour de Jésus-Christ et le zèle de la Vertu,ne cède point
à l'attrait des consolations, et ne cherche point les douceurs sensibles... il désire
plutôt de fortes épreuves et souffrir de durs travaux pour Jésus-Christ.
4. Quand donc Dieu vous accorde quelque
consolation spirituelle... recevez-là avec Actions de Grâces...
mais reconnaissez-y le Don de Dieu, et non votre propre mérite.
Ne vous en élevez pas, n'en ayez point trop de joie, n'en concevez point une vaine
présomption.
Que cette Grâce, au contraire,vous rende plus humble, plus vigilant,
plus timide dans toutes vos actions: car ce moment passera, et sera suivi de la tentation.
Quand la consolation vous est ôtée, ne vous découragez pas aussitôt... mais attendez
avec humilité et avec patience que Dieu vous visite de nouveau... car Il est
Tout-Puissant pour vous consoler encore plus !
Celà n'est ni nouveau, ni étranger pour ceux qui ont l'expérience des Voies de Dieu:
les grands Saints et les anciens Prophètes ont souvent éprouvé ces viscissitudes.
5. L'un d'eux , sentant la présence de la
Grâce, s'écriait: J'ai dit dans mon abondance: Je ne serai jamais ébranlé !
Mais la Grâce s'étant retirée, ajoutait: Vous avez détourné de moi votre
Face, et j'ai été rempli de trouble (Ps 29, 7-8).
Dans ce trouble cependant il ne désespère point; mais il prie le Seigneur avec plus
d'insistance, disant: Seigneur, je crierai vers Vous et j'implorerai mon Dieu (
Ps 29,9 ).
Enfin il recueille le fruit de sa prière, et il témoigne qu'il a été exaucé: Le
Seigneur m'a écouté, il a eu pitié de moi: Le Seigneur s'est fait mon appui (Ps
29, 11 ).
Mais comment ? Vous avez changé mes gémissements en chants d'allégresse, et Vous
m'avez environné de Joie ( Ps 29, 12 ).
Or, puisque Dieu en use ainsi avec les plus grands Saints, nous ne devons pas
perdre courage, pauvres infirmes que nous sommes, si quelquefois nous éprouvons de la
ferveur, et quelquefois du refroidissement: car l'Esprit de Dieu vient et se retire comme
il lui plaît... Ce qui faisait dire au bien heureux Job: Vous visitez l'homme dès le
matin, et aussitôt vous l'éprouvez ( Job 7,18 ).
6. En quoi donc espérer et en quoi mettre
ma confiance, si ce n'est uniquement dans la grande miséricorde de
mon Dieu et dans l'attente de la Grâce
céleste ?
Car, soit que j'ai près de moi des hommes vertueux, des religieux fervents, des amis
fidèles;
soit que je lise des saints livres et d'éloquents traités;
soit que j'entende le doux chant des hymnes :
cela aide peu et ne touche guère quand la Grâce se retire, et que je suis délaissé
dans ma propre indigence.
Alors il n'est pas de meilleur remède qu'une humble patience et l'abandon de soi-même à la Volonté de Dieu !
7. Je n'ai jamais rencontré d'homme si
pieux et si parfait,qui n'ait éprouvé quelquefois cette privation de la Grâce
et une diminution de ferveur.
Nul saint n'a été ravi si haut ni si remplit de Lumière, qu'il n'ait été tenté avant
ou après.
Car il n'est pas digne d'être élevé jusqu'à la contemplation de Dieu, celui qui n'a
pas souffert pour Dieu quelque tribulation.
La tentation annonce d'ordinaire la Consolation qui doit suivre.
Car la Consolation céleste est promise à ceux qu'a éprouvé la tentation. Celui qui
vaincra, dit le Seigneur, je lui donnerai à manger du fruit de l'arbre de Vie (
Apoc. 2, 7 ).
8. La Consolation divine est donnée afin
que l'homme ait plus de force pour soutenir l'adversité.
La tentation vient après, afin qu'il ne s'enorgueillisse pas du bien.
Car Satan ne dort point, et la chair n'est point encore morte: c'est pourquoi ne cessez
pas de vous préparer au combat, parce qu'à droite et à gauche sont des ennemis qui
ne se reposent jamais !
Pourquoi cherchez vous le repos, lorsque
vous êtes nés pour le travail ?
Disposez-vous à la Patience plutôt qu'aux consolations, et à porter la Croix plutôt qu'à goûter la joie !
Quel est l'homme du siècle qui ne reçût volontiers les joies et les consolations
spirituelles, s'il pouvait en jouir toujours ?
Car les consolations spirituelles surpassent tous les délices du monde et toutes les
voluptés de la chair.
Toutes les délices du monde sont ou honteuses
ou vaines;...
les délices spirituelles sont seules douces et chastes, nées des vertus et répandues
par Dieu dans les coeurs purs.
Mais nul ne peut jouir toujours à son gré des consolations divines, parce que la
tentation ne cesse jamais longtemps.
2. Une fausse liberté d'esprit et une
grande confiance en soi-même forment un grand obstacle aux visites
d'en haut.
Dieu accorde à l'homme un grand bien en lui donnant la Grâce de la consolation; mais
l'homme fait un grand mal quand il ne remercie pas Dieu de ce don et ne le lui rapporte
pas tout entier.
Si la Grâce ne coule point abondamment sur nous, c'est que nous sommes ingrats envers son Auteur, et que nous ne remontons point à sa Source
première...
Car la Grâce n'est jamais refusée à celui qui la reçoit avec gratitude, et Dieu
ordinairement donne à l'humble ce qu'il ôte au superbe.
3. Je ne veux point de la consolation qui
m'ôte la componction, je n'aspire point à la contemplation qui conduit à
l'orgueil.
Car tout ce qui est élevé n'est pas Saint;
tout ce qui est doux n'est pas bon;
tout désir n'est pas pur;
tout ce qui est cher à l'homme n'est pas
agréable à Dieu.
J'aime une Grâce qui me rend plus humble, plus vigilant, plus prêt à me renoncer
moi-même.
L'homme instruit par le don de la Grâce, et par Sa privation, n'osera s'attribuer aucun
bien... mais plutôt confessera son indigence et sa nudité.
Donnez à Dieu ce qui est à Dieu; et ce qui est de vous, ne l'imputez qu'à vous.
Rendez gloire à Dieu de ses Grâces, et reconnaissez que, n'ayant rien à vous que le péché, rien ne vous est dû que la peine du péché.
4. Mettez-vous toujours à la
dernière place (Luc 14,10 )... et la première vous sera donnée; car ce qui est le
plus élevé s'appuie sur ce qui est le plus bas.
Les plus grands Saints aux yeux de Dieu sont les plus petits à leurs propres yeux; et
plus leur vocation est sublime, plus ils sont humbles dans leur coeur.
Pleins de la Vérité et de la Gloire céleste, ils ne sont pas avides d'une gloire vaine.
Fondés et affermis en Dieu, ils ne sauraient s'élever en eux-mêmes.
Rapportant à Dieu tout ce qu'ils ont
reçu de bien, ils ne recherchent point
la gloire que donnent les hommes, et ne veulent que Celle qui vient de Dieu seul... leur
unique but, leur désir unique, est qu'Il soit glorifié en Lui-même et dans tous les
Saints, par dessus toutes choses.
5. Soyez donc reconnaissants des moindres Grâces, et vous mériterez d'en recevoir de plus grandes.
Que le plus léger don, la plus petite faveur, aient pour vous autant de prix que le don
le plus excellent et la faveur la plus singulière.
Si vous considérez la Grandeur de Celui qui donne, rien de ce qu'Il donne ne vous
paraîtra petit ni méprisable; car
peut-il être quelque chose de tel dans ce qui vient d'un Dieu infini ?
Vous envoie-t-Il des peines et des châtiments, reçevez-les encore avec joie... car c'est toujours pour votre Salut qu'Il fait ou qu'Il promet tout
ce qui nous arrive.
Voulez-vous conserver la Grâce de Dieu, soyez reconnaissant lorsqu'Il vous la donne,
patient lorsqu'Il vous l'ôte.
Priez pour qu'elle vous soit rendue, et soyez humble et vigilant pour ne pas la perdre.
Il y en a beaucoup qui désirent le Céleste
Royaume de Jésus ... Mais peu consentent à porter Sa Croix !
Beaucoup souhaitent Ses consolations... mais peu aiment Ses souffrances.
Il trouve beaucoup de compagnons de Sa table... mais peu de Son abstinence.
Tous veulent partager Sa Joie... mais peu veulent souffrir quelque chose pour Lui.
Plusieurs suivent Jésus jusqu'à la fraction du Pain... mais peu jusqu'à boire le calice
de Sa Passion.
Plusieurs admirent Ses miracles... mais peux goûtent l'ignominie de Sa Croix.
Plusieurs aiment Jésus pendant qu'il ne leur arrive aucune adversité...
Plusieurs Le louent et Le bénissent tandis qu'ils reçoivent Ses consolations...
Mais si Jésus se cache et les délaisse un moment... ils tombent dans le murmure ou dans
un excessif abattement.
2. Mais ceux qui aiment Jésus pour Jésus...
et non pour eux-mêmes, Le bénissent dans toutes les tribulations et
dans l'angoisse du coeur, comme dans les consolations les plus douces.
Et quand Il ne voudrait jamais les consoler, toujours cependant ils Le loueraient,
toujours ils Lui rendraient grâces.
3. Oh ! Que ne peut l'Amour de Jésus, quand
il est pur et sans aucun mélange d'amour ni d'intérêts
propres !
Ne sont-ce pas des mercenaires ceux qui cherchent toujours des consolations ?
Ne prouvent-ils pas qu'ils s'aiment eux-mêmes plus que Jésus-Christ, ceux qui pensent
toujours à leur gain et à leurs avantages ?
Où trouvera-t-on quelqu'un qui veuille servir Dieu pour Dieu seul ?
4. Rarement on rencontre un homme assez
avancé dans les voies spirituelles pour être dépouillé de tout.
Car le véritable pauvre d'esprit, détaché de toute créature, qui le trouvera ?
Il faut le rechercher bien loin et jusqu'aux extrémités de la terre ( Prov.
31,18)
Si l'homme donne tout ce qu'il possède, ce n'est encore rien (Cant.8,7 )
S'il fait une grande pénitence, c'est peu encore.
S'il embrasse toutes les sciences, il est encore loin.
Et s'il a une grande vertu et une piété fervente, il lui manque encore beaucoup, il lui
manque une chose souverainement nécessaire.
Qu'est-ce donc ? C'est qu'après avoir
tout quitté, il se quitte aussi lui-même, et se dépouille entièrement de l'amour de
soi.
C'est ,enfin, qu'après avoir fait tout ce qu'il sait devoir faire, il pense encore
n'avoir rien fait.
5. Qu'il estime peu ce qu'on pourrait
regarder comme quelque chose de grand, et qu'en toute sincérité il confesse qu'il est un
serviteur inutile, selon la parole de la Vérité: Quand vous
aurez fait tout ce qui vous est commandé, dites: Nous sommes des serviteurs inutiles (
Luc. 17,16).
Nul cependant n'est plus riche, plus puissant, plus libre que celui qui sait quitter tout
et soi-même, et se mettre au dernier rang.
Cette parole semble dure à plusieurs: Renoncez
à vous-même, prenez votre Croix, et suivez Jésus (Luc 9,23).
Mais, il sera bien plus dur, au dernier jour, d'entendre cette parole: Retirez-vous de
Moi, maudits; allez au feu éternel (Matth. 15,41) !
Ceux qui écoutent maintenant volontiers la Parole qui commande de porter la Croix, et qui
y obéissent, ne craindront point alors d'entendre l'arrêt d'une éternelle condamnation.
Ce signe de la Croix sera dans le Ciel, lorsque le Seigneur viendra pour juger (Matt.24,30
).
Alors tous les disciples de la Croix qui auront imité, pendant leur vie, Jésus
crucifié, s'approcheront avec grande
confiance de Jésus-Christ Juge.
2. Pourquoi donc craignez-vous de porter la
Croix, par laquelle on arrive au Royaume du Ciel ?
Dans la Croix est le Salut, dans la
Croix la Vie, dans la Croix la Protection contre nos ennemis !
C'est de la Croix que découlent les
suavités célestes.
Dans la Croix est la force de l'âme, dans la Croix la Joie de l'esprit, la consommation
de la Vertu, la perfection de la Sainteté.
Il n'y a de Salut pour l'âme, ni d'espérance de Vie éternelle que dans la Croix.
Prenez donc votre Croix, et suivez Jésus ... et vous parviendrez à l'éternelle Vie !
Il vous a précédé portant Sa Croix, et Il est mort pour vous sur la
Croix, afin que vous aussi vous portiez votre Croix, et que vous aspiriez à mourir sur la
Croix.
Car si si vous mourez avec Lui, vous vivrez aussi avec Lui (Rom. 6,8 ); et si
vous partagez Ses souffrances, vous partagerez Sa Gloire !
3. Ainsi tout est dans Sa Croix, et tout
consiste à mourir.
Il n'est point d'autre Voie qui conduise à la Vie et à la véritable Paix du coeur que
la voie de la Croix et d'une mortification continuelle.
Allez où vous voudrez, cherchez tout ce que vous voudrez, et vous ne trouverez pas au
dessus une Voie plus élevée, au dessous une Voie plus sûre que la Voie de la Sainte
Croix.
Disposez de tout selon vos vues, réglez tout selon vos désirs, et toujours vous
trouverez qu'il vous faut souffrir
quelque chose, que vous vouliez ou non...
et ainsi vous trouverez toujours la Croix.
Car, ou vous sentirez de la douleur dans le corps, ou vous éprouverez de l'amertume dans
l'âme.
4. Tantôt vous serez délaissé de Dieu,
tantôt exercé par le prochain, et, ce qui est plus encore, vous serez souvent à charge
de vous-même.
Vous ne trouverez à vos peines aucun remède, aucun soulagement; mais il vous faudra
souffrir aussi longtemps que Dieu le
voudra.
Car Dieu veut que vous appreniez à souffrir sans consolation, que vous vous soumettiez à
Lui sans réserve et que vous deveniez plus humble par la tribulation.
Nul n'a si avant dans son coeur la Passion de Jésus-Christ que celui qui a souffert
quelque chose de semblable.
La Croix est donc toujours préparée...
elle vous attend partout !
Vous ne pourrez la fuir, quelque part
que vous alliez, puisque partout où vous irez vous vous porterez et vous trouverez
toujours vous-même.
Elevez-vous, abaissez-vous, sortez de vous-même, rentrez-y... toujours vous trouverez la Croix...et il faut que partout vous preniez patience, si vous voulez posséder
la Paix intérieure et mériter la couronne immortelle.
5. Si vous portez de bon coeur la Croix, elle même vous portera... et elle vous conduira au terme désiré, où vous
cesserez de souffrir... mais ce ne sera pas en ce monde.
Si vous la portez à regret, vous en
augmenterez le poids, vous rendrez votre
fardeau plus dur... et cependant il vous faut la porter.
Si vous rejetez une Croix, vous en trouverez certainement une autre... et peut-être plus pesante...
6. Croyez-vous échapper à ce que nul homme
n'a pu éviter ?
Quel Saint a été en ce monde sans Croix et sans tribulation ?
Jésus-Christ lui-même, Notre Seigneur, n'a pas été une seule heure dans toute Sa vie,
sans éprouver quelque souffrance.
Il fallait , dit-il, que le Christ souffrît, et qu'Il ressuscitât d'entre
les morts, et qu'Il entrât ainsi dans Sa Gloire (Luc.24,26, 46).
Comment donc chercherez vous une autre voie que la Voie Royale de la Sainte Croix ?
7. Toute la vie de Jésus-Christ n'a été
qu'une Croix et un long martyre: et vous cherchez
le repos et la joie ?!
Vous vous trompez, n'en doutez pas... vous vous trompez lamentablement, si vous cherchez
autre chose que des afflictions à souffrir... car toute cette vie mortelle est pleine de
misères et environnée de Croix.
Et plus un homme aura fait de progrès dans les voies spirituelles, plus ses croix souvent seront
pesantes, parce que l'amour lui rend son
exil plus douloureux.
8. Cependant celui que Dieu éprouve par
tant de peines n'est pas sans consolations qui les adoucissent, parce qu'il sent
s'accroître les fruits de sa patience à porter sa Croix.
Car lorsqu'il s'incline volontairement sous elle, l'affliction qui l'accablait se change
toute entière en une douce confiance
qui le console.
Et plus la chair est affligée, brisée... plus l'esprit est fortifié intérieurement par
la Grâce.
Quelquefois même le désir de souffrir, pour être conforme à Jésus crucifié, lui
inspire tant de force, qu'il ne voudrait pas être exempt de tribulations et de douleurs,
parce qu'il se croit d'autant plus agréable à Dieu qu'il souffre pour Lui d'avantage.
Ce n'est point là la vertu de l'homme, mais la Grâce de Jésus-Christ, qui opère si
puissamment dans une chair infirme, que tout ce qu'elle abhorre et fuit naturellement, Elle
l'embrasse et l'aime par la ferveur de l'Esprit.
9. Il n'est pas naturel à l'homme de porter
la Croix, d'aimer la Croix, de châtier le corps, de le réduire en servitude, de fuir les
honneurs, de souffrir volontiers les outrages, de se mépriser soi-même et de souhaiter
d'être méprisé, de supporter les afflictions et les pertes, et de ne désirer aucune
prospérité dans ce monde.
Si vous ne regardez que vous, vous ne
pouvez rien de tout cela.
Mais si vous vous confiez dans le Seigneur, la force vous sera donnée d'en haut, et vous aurez pouvoir sur la chair et le monde !
Vous ne craindrez pas même le démon, votre ennemi, si vous êtes armé de la Foi et
marqué de la Croix de Jésus-Christ.
10. Disposez-vous donc, comme un bon fidèle
de Jésus-Christ, à porter courageusement la Croix de votre Maître crucifié par Amour
pour vous !
Préparez-vous à souffrir mille adversités, mille traverses en cette misérable vie...
car voilà partout ce qui vous attend, ce que vous trouverez partout, en quelque lieu que
vous vous cachiez.
Il faut qu'il en soit ainsi: et, à cette foule de maux et de douleurs il n'y a d'autre
remède que de vous supporter vous-même.
Buvez avec joie le Calice du Sauveur, si Son Amour vous est cher, et si vous désirez avoir
part à Sa Gloire .
Laissez Dieu disposer de Ses consolations: qu'Il les répande comme Il lui plaira.
Pour vous choisissez les souffrances, et regardez-les comme des consolations d'un grand
prix... car toutes les souffrances du temps n'ont aucune proportion avec la Gloire
future, et ne sauraient vous la mériter (Rom. 8,18), quand seul vous les
supporteriez toutes.
11. Lorsque vous en serez venu à trouver la
souffrance douce, et à l'aimer pour Jésus-Christ, alors estimez-vous heureux, parce que vous avez
trouvé le Paradis sur la terre !
Mais, tandis que la souffrance vous sera amère et que vous la fuirez, vous vivrez dans le
trouble... et la tribulation que vous
fuirez vous suivra partout.
12. Si vous vous appliquez à être ce que vous devez être, à souffrir et à mourir, bientôt vos peines
s'adouciront et vous aurez la Paix.
Quand vous auriez été ravi, avec Paul, jusqu'au troisième ciel, vous ne seriez pas pour
celà assuré de ne rien souffrir.
Je lui montrerai, dit Jésus, combien il faut qu'il souffre pour Mon Nom (Act.
9,16 ).
Il ne vous reste donc qu'à souffrir, si vous voulez aimer Jésus et Le servir
constamment.
13. Plût à Dieu que vous fussiez digne de
souffrir quelque chose pour le Nom de Jésus ! Quelle gloire vous serait réservée !
Quelle joie parmi tous les Saints ! Quelle édification pour le prochain !
Car tous recommandent la patience, quoique peu cependant veuillent souffrir.
Avec quelle joie vous devriez souffrir quelque chose pour Jésus, lorsque tant d'autres
souffrent beaucoup plus pour le monde !
14. Sachez et croyez fermement que votre vie
doit être une mort continuelle, et que plus
on meurt à soi-même, plus on commence à vivre pour Dieu.
Nul n'est propre à comprendre les
choses du Ciel, s'il ne se soumet à supporter les adversités pour Jésus-Christ.
Rien n'est plus agréable à Dieu, rien ne nous est plus salutaire en ce monde, que de
souffrir avec joie pour Jésus-Christ;...et si vous aviez à choisir, vous devriez plutôt
souhaiter d'être affligé pour Lui que d'être comblé de consolations, parce que vous
seriez alors plus semblable à Jésus-Christ et plus conforme à tous les Saints.
Car notre mérite et notre progrès dans la perfection ne consistent point dans la douceur
et l'abondance des consolations, mais plutôt dans la force de supporter de grandes tribulations et de pesantes
épreuves.
15. S'il y avait eu pour l'homme quelque
chose de meilleur et de plus utile que de souffrir, Jésus-Christ nous l'aurait appris par
Ses Paroles et par Son exemple.
Car manifestement Il exhorte à porter la Croix aux disciples qui Le suivaient, et tous
ceux qui voulaient Le suivre, disant: Si quelqu'un veut marcher sur Mes pas, qu'il
renonce à soi-même, qu'il porte sa Croix et qu'il Me suive ( Matth. 21,25 )
Après donc avoir tout lu et tout examiné, concluons enfin qu'il nous faut passer par
beaucoup de tribulations pour entrer dans le Royaume de Dieu (Act. 14, 21 ).
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