...purificatrice de l'eau. au point que le rite se réduisit avec le temps à l'infusion tout
juste symbolique de quelques gouttes d'eau si le front.

 Non ! 
le symbole primordial du baptême est le retour à la matrice originelle signifiée par l'eau dont tous les mythes, la Genèse non exceptée, chantent le caractère primordial et archétypal. (...)
 
 Le baptême est rémission du péché en cela même qu'il est
l'accès à un nouveau et définitif degré de l'être,
 celui qui est exprimé sous le symbole chrétien par la résurrection a mortuis,
 la montée ad dexteram et in sinum Patris ; 
dans le contexte védique c'est l'atteinte au pada caché ou à la guhâ,
 de toutes façons au centre essentiel de soi
 là où le mystère théandrique brille en non-dualité.
 
Le baptême chrétien a trop souffert d'avoir pris la succession du baptême de Jean, alors
qu'il en est essentiellement différent, comme ce fut immédiatement senti au moins par Paul et Jean.

Jésus est donc avant toute chose Sauveur d'abord par sa Présence au milieu l'humanité. 
Il l'est aussi par l'enseignement et l'exemple qu'il doit aux hommes sur les moyens de se sauver hic et nunc.
 
Car le Salut n'est pas d'abord quelque chose de futur,
 une sorte de survie céleste qu'il faut préparer ici-bas de la meilleure manière possible
 
Il est
avant tout une Réalité à atteindre hic et nunc, en ce moment même où je suis 
 réalité qui par le fait même qu'en lui je suis, a valeur pour moi d'éternité.
 
Comme le dit si fortement Jésus en saint Jean: celui qui croit en lui, qui prend au sérieux sa parole, 
qui le reconnaît comme Fils de Dieu,
 non seulement d'une confession de bouche mais d'une parole de foi qui est opérante jusqu'aux derniers retraits de son coeur (là d'où finalement elle jaillit),
 
celui-là est déjà passé de la mort à la vie, 
est délivré des liens du
samsâra,
 est passé
au-delà du processus mort-résurrection.

 Cet acte fondamental de son être libéré en lui par sa rencontre avec Jésus l'a jeté d'un bond
au-delà des limites qui cernent la condition mortelle
, à savoir celles de la crainte,
 du vieillissement,
 de la mort 
et tout aussi bien du péché. 

Il est passé au-delà des symboles, 
au delà des paraboles (Jn.16).

 Il a atteint à son état de Fils de Dieu, 
Il a passé
par-delà les voiles, miroirs et enigma (I Cor. 13) ;
Il connaît Dieu comme il est connu de lui,
c'est-à-dire en soi tel qu'il EST, 
dans le Ego eimi de l'être,
dans la conscience éveillée, on pourrait dire de la personne. 

Jésus a inauguré une voie de salut, sa propre mârga.
 Lui-même est
Voie par excellence parce qu'il est Vérité et Vie, tout comme les paroles qu'il prononce sont Vérité et Vie.

Cette Voie est avant tout de croire en lui comme il vient d'être expliqué, 
c'est-à-dire de reconnaître Dieu en lui, 
Dieu qui confronte l'homme jusqu'au fond de son coeur,
 non point d'une simple façon morale comme on l'explique le plus souvent - en lui découvrant son péché - 
mais
au-delà de tout symbole  
et d'une manière bien plus bouleversante encore... 
qui le confronte en son Éveil même à l'Être,
 à Soi, 
et le questionne sur la conscience qu'il prend de cet Éveil même, dans la personnalité qu'il s'attribue.

Pour mieux comprendre la voie de salut inaugurée par Jésus il y a intérêt à se rappeler d'abord les voies de salut proposées par le bouddhisme et les voyants des Upanishads.
 
Dans la tradition indienne, le désir de salut se fait jour dans l'âme quand l'homme devient conscient de la crainte fondamentale qui sous-tend toute sa vie,
 quelque chose de l'angoisse analysée par l'existentialisme présent. 
Crainte de la souffrance, physique et morale,
 du dépérissement,
 de la mort, 
des renaissances qui suivront indéfiniment avec les mêmes séries de souffrances que pourront mal compenser les joies qui les traversent, car ces joies elles-mêmes sont essentiellement momentanées;
 en un mot, crainte de samsâra,
 ces successions indéfinies de naissances et de morts qui s'appellent incessamment les unes les autres 
tout comme le lever du matin et le coucher du soir. 
Et pour qui ne croirait pas au samsâra, l'angoisse n'est pas moindre de ce néant de conscience qui attend l'homme quand son organisme physique lâche;
 ou bien pour le croyant, de ce dilemme fou - puisque engageant l'éternité - avec lequel toutes les traditions religieuses le confrontent.

Dans la ligne de la tradition de l'Inde,
le Bouddha reprend le même thème, mais l'analyse de manière plus systématique. 
Pour lui la situation humaine est faîte de
douleur. 
L'homme est profondément malheureux, sarvam duhkham (inquiétude et tourment intérieur consécutifs à la constatation de l'universelle impermanence).
 Ses joies sont toujours superficielles et passagères... 
Pour le Bouddha et la tradition védique aussi bien, il existe cependant
un état caché de joie et de paix, mais d'une pureté telle...
 qu'il est absolument inaccessible à la pensée et à la perception de l'homme.
 C'est le pada ( le pas, la trace, le Mystère caché) védique, 
la guha upanishadique,
 
le nirvâna bouddhique.

Le Bouddha a découvert que la source de toute la crainte et la souffrance de l'homme est le désir, la soif, tanhil. 
Supprimez cette soif d'avoir, d'être, de n'être pas, etc.,
 et vous découvrirez ou bien vous recouvrerez - cet état primordial d'où toutes douleurs sont absentes,
 ou plutôt en cet état 'caché', un état, un lieu, une sphère, un loka tel que n'y atteignent ni joie ni non-joie,
ni paix ni non-paix, 
ni conscience ou personnalité,
 ni âtman, ni être,
 puisque tout ce qui est perceptible à la conscience appartient nécessairement
à la sphère de cet ego qui justement est la source de toute notre ignorance et de notre désir, 
...et donc rien ne peut être dit de cet état de nirvâna (qui n'est pas synonyme d'anéantissement de l'être mais
extinction des facteurs de l'existence phénoménale,
 apaisement ultime).

La Voie de salut est donc pour le Bouddha la suppression de cette soif, 
et c'est à cette lumière que doit s'entendre tout le développement ultérieur du bouddhisme. 

Pour les Upanishads la Voie de salut est la découverte par l'homme de son soi véritable
 hors de l'atteinte de tous les événements intérieurs ou extérieurs qui le font craindre et souffrir. 
La source du mal de l'homme n'est pas simplement ce désir qui n'en est que la manifestation , mais le
fondement de ce désir qui est l'ahamkâra (l'ego), 
la centration sur un point donné,
 centre pour ainsi dire de cristallisation à la fois de son psychisme et de son organisme corporel - de tout ce loka d'abord accessible à la perception intérieure, 
puis du monde entier considéré comme centré sur lui, 
finalement de l'être en soi, jaillissant pour ainsi dire de cet ego.
 
L'homme prend ainsi un point intérieur de son soi phénoménal comme le centre de l'être,
 alors que le centre de l'être est indépendant de toute localisation psychique comme physique ! 

Le moyen (mârga) de se libérer de cet ahamkâra sera l'Éveil précisément à ce soi profond ,
 Éveil que provoquera - sans en être la cause - l'enseignement des Écritures et du guru qualifié, auquel prépareront les diverses mârga particulières, de méditation jnâna ( sagesse, connaissance salvatrice) ou de yoga, de karma ou de bhakti.

C'est ce mal fondamental de l'homme que le salut doit atteindre
 bien plus que sa projection eschatologique ou même que sa manifestation et actualisation en péché. 

C'est de ce faux ego que d'abord l'homme doit être sauvé.(...)
 

On pourrait dire que cet Éveil au Réel dont parlent les Upanishads correspond en contexte chrétien à la réalisation de la divinité de Jésus,
 à la foi en Jésus, 
en termes plus simples à la confrontation de soi avec Dieu en Jésus, 
confrontation qui atteint aux abîmes mêmes de soi.

 Jésus étant non seulement les Écritures mais la Parole, le Shabda lui-même,
 et étant aussi le Sadguru, 
il s'ensuit que
n'importe lequel de ses disciples qui a réalisé cette Présence confrontant l'homme jusqu'en son intérieur est capable d'éveiller son frère à cette Présence. 

Mais il importe de ne jamais oublier que le but de la rencontre avec Jésus n'est pas son corps mortel - « il est bon pour vous que je m'en aille » (Jn. 16,7)
, noli me tangere : « ne me touche pas », dit Jésus à Marie de Magdala -
 mais la renaissance en l'Esprit hors tout loka, toute direction, tout lieu même psychologique : « vous ne savez ni d'où il vient ni où il va » (Jn. 3,8).

Mais à cet Éveil, tout comme dans les mârga ultérieures aux Upanishads ou à l'enseignement du Bouddha, il y aura des préparations. 
Ces préparations provoqueront l'éveil à des niveaux progressifs du psychisme ;
 elles feront vivre déjà sous des signes et des symboles la Réalité cachée 
et libéreront peu à peu l'âme pour que le papillon puisse sortir de la chrysalide.

Le yoga de Jésus ne donnera pas pourtant la place privilégiée à la méditation comme le font l'hindouisme et le bouddhisme. 
Il est essentiellement pratique....

Quoi qu'il en soit de la Réalité finale de cet ego  qui est niée par le Vedanta à la suite des grandes Upanishad
il s'agit d'une manière ou d'une autre d'en être libéré,
 mais non pas en faveur d'une sorte de super-ego,
 toujours prêt à prendre la place de l'ego
 à dépasser et à s'identifier à son tour à l'Aham infini 
 au Je infini  du fond de l'être. 

Disons en simples termes de tradition paulinienne que
cet ego doit céder la place au Pneuma  
ce Pneuma étant indissolublement le Pneuma divin 
et notre Pneuma, rené de Lui au plus intime de nous.

Jésus propose à l'homme de réduire cet ego en le confrontant non seulement avec Dieu 
- car il est si facile de projeter Dieu en une sorte de super-ego - 
mais à autrui :
c'est la double et unique loi de l'amour. 

Jésus a prêché la loi d'amour et du service désintéressé; 
Il en a donné l'exemple le plus total. 
Il a de plus donné l'exemple de préférer le Royaume, l'ordre de Dieu, à sa propre vie. 
Il est mort parce qu'il a refusé d'abandonner la mission reçue du Père.

Le yoga essentiel de Jésus - et c'est là le seul yoga proprement chrétien - 
est de mettre le prochain avant soi dans sa pensée, son désir et son action. 
En termes hindous cela s'appellerait karma; ( acte cultuel)
mais c'est un karma qui est déjà tout imprégné d'expérience .

 Le disciple de Jésus sert et aime son prochain avant même de s'aimer et de se servir lui-même, puisqu'il dit préférer donner sa propre vie pour le prochain s'il veut être véritable disciple de Jésus ;
 et ce, parce qu'il est confronté a la Présence manifestée en ce moment donné de son existence, par son truchement.

Servir le prochain cause de Dieu ou à cause de Jésus n'est pas encore comprendre intégralement la vérité évangélique. 
Dans la perspective de Jésus le prochain et Dieu ou Jésus
ne sont pas autres (dvaita).

 La Présence transparaît dans le prochain aussi certainement qu'elle transparaît en Jésus. 

La foi en Jésus n'est pas intégrale si elle ne plénifie pas en la foi en l'homme,
 en la reconnaissance de la divine filiation, 
ou, si l'on préfère, de l'appel divin à être fils de Dieu à l'origine même de l'être de chaque personne humaine.

Ainsi, en aimant et en servant le prochain selon l'ordre Jésus, le chrétien fait déjà l'expérience de la Présence transformante et
anéantissante de ce don de sa propre vie pour le règne de Dieu et le prochain; 
don que Dieu peut toujours réclamer de celui qui affirme sa foi en Jésus.

Le Royaume est présent en un homme dès le moment où il a accepté et fait sienne la loi d'amour de Jésus; 
c'est-à-dire qu'il a accepté de faire passer le choix de Jésus, de Dieu, de l'autre, avant son propre choix. 

Déjà au niveau de sa conscience phénoménologique il a mis Dieu, le prochain, Jésus à la première place.
 Il a réalisé que ce Mystère théandrique qu'il est soi-même déborde infiniment cette centration sur soi de sa conscience d'être 
et que son centre vrai est cette
koinônia humaine en laquelle se manifeste d'une façon privilégiée au monde du créé le Mystère de Dieu.

L'homme qui aime et sert à la suite de Jésus est
un libéré, 
d'une libération combien plus vraie que cette pseudo-libération qui consiste en un ersatz d'expérience au niveau du concept et dont se contentent trop les soi-disant védantins et yogis d'Inde et d'Europe. 
Il a « défait les noeuds de son coeur », comme dit l'Upanishad ; 
cette attache de soi au monde mouvant de ses désirs et de ses identifications successives,
 à ce qu'il pense, perçoit, sent et désire ; 
il est libéré de cet égoïsme qui est la source de toute peine et de toute crainte. 

Bien sûr les vagues des passions intérieures et des attaques et appels du dehors continueront à déferler sur lui ; 
il en sentira souvent l'angoisse (car le stoïcisme n'est pas son idéal), comme Jésus lui-même, spécialement en son agonie à Gethsémani ; 
mais cette angoisse n'affectera jamais son être profond, le lieu en lui du Pneuma, de l'Esprit.

 Au milieu de toutes les contradictions et souffrances il gardera sa paix et sa joie profonde.

 Différent du stoïcisme, cela ne l'est pas moins du nirvàna objet de pensée
, et dont le concept précisément marque la vie du bouddhiste qui n'en n'a pas encore expérience, l' anubhava
Le disciple de Jésus continue à s'intéresser à ses frères, 
aux problèmes des hommes et à ceux de la société dans laquelle il vit,
 mais l'intérêt qu'il leur porte n'est
ni dispersant ni distrayant,
 ni non plus asservissant, 
car ce prochain qu'il aime, qu'il sert et dont il veut le salut
est précisément ce Mystère le plus profond de soi-même.

Libéré, le yogi chrétien est libérateur.
 
Le disciple de Bouddha, lui, a appris à répandre sa compassion sur tous les êtres.
Le disciple de Jésus n'a même pas à exercer consciemment cette compassion, qui parfois se nuance de façon pénible de condescendance envers qui n'a pas encore trouvé la voie de la libération.
 
Il est par expérience profonde un homme en koinônia;
 
Et non seulement par expérience mais également par condition ontologique, pourrait-on dire, car son centre véritable à soi-même est précisément cette koinônia humaine.
 
De son coeur ne jaillit plus aucun de ces sentiments, de haine, d'indifférence hautaine, d'antipathie ou même de condescendance,
 qui, non seulement vicient terriblement les relations des hommes, même si rien ne les manifeste au-dehors,
 mais qui, comme des ondes néfastes, attaquent et ruinent en son principe même
l' être-ensemble ' (samsat) des hommes.

 Au contraire, de son coeur rayonne l'Amour, 
un Amour qui se manifestera spontanément par le service humble de ses frères selon les circonstances qui se présentent à chaque moment de la vie et selon les besoins d'un chacun.
 Il ne fait plus aucune peine à quiconque, ni par action ni même en pensée ou en désir. 
Cela ne veut pas dire, bien sûr, qu'il devra satisfaire tout désir quel qu'il soit de son voisin ; mais, même quand il aura à le lui refuser, ce sera de la façon même dont il se refuse à soi-même les faux désirs qui montent de son coeur. 

Avec Jésus et à sa suite, son disciple sera tout rayonnement d'Amour,
 de l'Amour de celui qui est tout passé en l'Autre,
 essentiellement « homme pour ses frères ».


Le yoga
( la voie, la méthode )de Jésus est koinônia comme il est amour, comme il est Présence. 
Il est koinônia 
Il est koinônia justement parce qu'il est présence d'Amour, expansion.
 
Le yoga de Jésus est essentiellement pratique comme celui du Bouddha, quoique de façon bien différente.
 Le Bouddha a défendu aux siens de se perdre dans les problèmes métaphysiques et théologiques - ce que souvent ils n'ont pas su éviter.
 Il laissa totalement de côté le problème par excellence qu'est celui de l'Absolu, de Dieu,
 car le Mystère de Dieu est bien plus vraiment et proprement atteint dans le non-désir - qui est participation essentielle à ce Mystère - que par toutes les constructions conceptuelles, ou les actes de piété ou de dévotion. 
Dans le christianisme également spéculation et juridisme vinrent bien souvent trahir la pureté du message de Jésus.

La koinônia essentielle
a à être vécue beaucoup plus que définie et structurée sociologiquement.
 Le Mystère de la Trinité doit être vécu, non défini; 
et de même celui de Jésus et de la koinônia ecclésiale. 

Dès que deux ou trois sont réunis en son nom, le Christ est là et le Royaume est présent.
Le Royaume annoncé par Jésus est cette koinônia même des croyants, qui sont tous unum cor, unum corpus, una anima, qui ont dépassé leur égotisme congénital dans l'amour mutuel ou agapê.

Il est important cependant de remarquer que la koinônia et l'agapê chrétiennes ne se limitent pas aux croyants. 
Cette koinônia
englobe le genre humain et le créé tout entier,
 et elle n'est possible entre croyants que parce que justement elle est latente au coeur de chaque membre de l'humanité.
 Elle est essentiellement communion ouverte.
 
Le Royaume visible n'en est qu'une manifestation sans cesse en recherche de sa plénitude, de sa perfection.
 Le chrétien qui n'étendrait pas son amour à tous et chacun des hommes et des êtres ne serait chrétien que de nom. 

C'est avec chacun qu'il est prêt à partager tout,
 car c'est en chacun qu'il découvre la Présence, 
cette Présence qui est le centre même de son Être.

Cette koinônia est salvatrice autant autour d'elle-même qu'à l'intérieur d'elle-même. 
C'est en cette koinônia que le chrétien sauve et se sauve,
puisque Jésus lui-même est essentiellement non à part de cette koinônia humaine.

Si l'Église est porteuse de salut, ce n'est point en tant qu'institution (comme le dit une certaine théologie qui veut sans cesse chercher en Israël l'idéal du Nouveau Testament),
mais en tant que koinônia. 

Il y a sans doute des signes sacramentaux de cette koinônià - la venue ensemble, la rencontre des membres du Seigneur. 
L'homme n'est pas pur esprit et c'est au moyen des signes charnels et physiques qu'il progresse d'ores et déjà dans sa koinônia humaine. 
L'amour sans doute est spirituel dans son essence;
 cependant le baiser et l'enlacement des corps ne sont-ils pas les moyens par lesquels se fait l'amour ?
 
Non seulement ils l'expriment, mais ils le nourrissent, ils le développent, le réalisent et l'amplifient.
 Les deux sacrements fondamentaux de la koinônia chrétienne sont
le rite d'introduction et le repas pascal. 

Le rite d'introduction
est avant tout un rite de renaissance, comme il fut rappelé plus haut. 
La foi nécessaire au baptême n'est pas l'acceptation intellectuelle que Jésus est le Fils de Dieu; c'est donner sa foi au Christ et accepter de vivre non plus au niveau de son ego, mais au niveau du « moi » du Christ 
donc du mystère de la koinônia,
 et tout autant au niveau de notre condition de fils du Père éternel.
 
Cela implique
la mort et le dépouillement du vieil homme  
ainsi que l'acceptation de la loi essentielle de la vie nouvelle: le commandement de l'amour.

Le repas pascal est de son côté un rite hautement symbolique de cette koinônia avec les croyants comme avec tout l'univers et du don à l'autre, du passage au plus profond de soi en l'autre- que cette koinônia est essentiellement. 
Ce rite accomplit ce qu'il signifie, nourrit cette koinônia, l'approfondit, l'amplifie sous tous ses aspects. 
Et cela ne se réalise pas seulement dans ces zones éthérées de notre être où les théologiens relèguent facilement ces sacrements pour suppléer à leur trop visible manque d'efficacité courante, 
mais cela doit se réaliser dans la vie même.

 Le rite du repas pascal doit être tel dans sa célébration même que nul ne devrait pouvoir y assister s'il ne se sent pas donné à chacun de ses frères, à tous les niveaux de son être.

L'Eucharistie est d'abord un repas au cours duquel on rompt et partage le pain ensemble.
 Elle est en cela même un signe privilégié de la koinônia.

 Partager 'le pain et le sel' veut que notre altérité-dualité est dépassée,
 que j'ai choisi d aimer chaque autre comme moi-même et de le servir;
 car nul ne peut être exclu de cette table s'il veut s'y asseoir et partager le pain avec moi.

Ce pain est d'ailleurs le signe de ma koinônia avec l'univers entier. 
Ce pain vient du blé semé et récolté dans un champ.
Et d'où vient cette semence, et cette terre en laquelle elle fut semée ?
 D'où viennent les hommes qui participèrent aux semailles et à la récolte, à la fabrication des instruments ?
 Et la pluie qui féconda le sol, de quels espaces vient-elle ?...

L'Eucharistie c'est aussi manger,
 mais manger ensemble, grandir ensemble.
 
C'est aussi un partage mutuel du pain et du vin...
 c'est donner et en donnant se donner;
 prenez, je vous donne mangez ce pain donné, livré, ce vin versé, répandu...
 Ce pain mangé ensemble en koinônia du Royaume qui vient est par excellence le Mystère du Christ.

 Il n'est pas de réunion, si restreinte  soit-elle, de membres de cette koinônia - « deux ou trois » qui ne soit Présence du Seigneur, ekklêsia. 
Et il n'est pas de - manger ensemble » en koinônia d'amour qui ne soit plus profondément encore cette Présence du Seigneur, ce signe de Dieu.

 Ce pain donné porte en soi tout le mystère du DON du Christ, incluant sa Passion, sa Mort et sa Résurrection.

Malheureusement le chrétien est trop souvent satisfait d'une participation rituelle au mystère du Christ qui vide le rite de sa res
de la réalité qu'il signifie...

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