Un village des Fidji fait repentance
pour avoir dévoré un missionnaire
mercredi 19 novembre 2003.
Les habitants d'un petit village des Fidji ont demandé jeudi pardon aux
descendants d'un missionnaire britannique tué et dévoré en 1867 par des
cannibales, dans l'espoir de lever la malédiction qui se serait depuis abattue
sur leur communauté.
Une dizaine de descendants du missionnaire méthodiste Thomas Baker, venus
d'Australie, ainsi que le Premier ministre fidjien Laisenia Qarase, ont pris
part à la messe et à une cérémonie traditionnelle organisée dans le centre de
Nabutautau où s'étaient rassemblées plusieurs centaines de personnes.
En 1867, Thomas Baker et huit de ses collègues fidjiens avaient été massacrés
puis mangés par des indigènes de ce village reculé de l'archipel du Pacifique
sud. Dans des récits de l'époque, un témoin racontait : "Nous avons tout mangé,
à l'exception de ses bottes". L'une d'elles est d'ailleurs aujourd'hui exhibée
au musée des Fidji.
Depuis ce drame, les quelque 200 membres de cette communauté s'estiment victimes
d'un mauvais sort car le village ne dispose ni d'école, ni de routes ou
d'équipement médical, et le cannabis y fait des ravages.
"Nous croyons que nous sommes victimes d'un sort et nous devons demander pardon
pour ce qui s'est passé. Une fois cela fait, nous serons à nouveau purs", a
récemment déclaré "ratu" (chef) Filimoni Nawawabalevu, petit fils du chef qui
tua le missionnaire.
La famille de Thomas Baker, qui connaissait le destin tragique de leur aïeul,
ignorait en revanche que les villageois se considéraient maudits. "Moi et ma
famille sommes plus que contents de pouvoir leur venir en aide de quelque
manière qu'ils le souhaitent", a déclaré Geoff Lester, arrière-arrière petit
fils du missionnaire.
Au milieu d'un cercle de tentes érigées au coeur du village, la cérémonie s'est
ouverte par le rituel du Kava, une boisson traditionnelle. Son point d'orgue a
été "la rupture de la chaine de la malédiction", symbolisée par un lâché de
ballons effectué par la famille de Thomas Baker.
Des jeunes du village ont aussi joué une pièce où le pasteur local Thomas
Baravilala brandissait la hache qui aurait servi à tuer le pasteur Baker. Un
descendant du religieux, Les Lester, a indiqué que sa famille était stupéfaite
par l'importance donnée à cet événement. "Ils pensaient que ça allait être une
petite cérémonie et ils se retrouvent à côté du Premier ministre et du Grand
conseil des chefs coutumiers", a-t-il déclaré.
Une dent de baleine a été remise à la famille du révérend Baker par les chefs
coutumiers, rappelant que le missionnaire avait lui aussi effectué un telle
offrande, censée alors le prémunir de la férocité des tribus des montagnes.
"J'espère que cet événement sera utile au peuple de Fidji et aux habitants de ce
village", a déclaré Geoff Lester, soulignant que son arrière-arrière grand-père
"était venu ici en ayant conscience des risques et en sachant ce qui pourrait
arriver".
Laisenia Qarase a pour sa part qualifié de "très bel acte" l'initiative des
villageois de Nabutautau. Il n'a en revanche pas fait mention d'une quelconque
rallonge budgétaire pour le village malgré son repentir.
Selon la légende, le révérend Baker a été dévoré pour avoir osé toucher à un
peigne du "ratu", transgressant ainsi une interdiction de toucher à la tête du
chef du village. Les historiens mettent en doute cette version, évoquant plutôt
une querelle de chefs qui aurait mal tourné.
Un soir de 1867, le révérend et certains de ses proches furent conduits à
l'extérieur du village par le chef Nawawabalavu avant d'être abattus avec de
longues haches de guerre. Les corps furent jetés dans un ravin puis récupérés
dans une rivière. Celui du révérend aurait été placé au sommet de la pile de
cadavres puis dépecé sur un rocher avant de faire l'objet d'un festin.
histoire réelle trouvée sur une dépèche du Net